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protègent. Enfin, des chances plus lointaines restaient entières ; ce n’était plus à travers une longue suite de guerres contre une monarchie du premier ordre, que la France pouvait entrevoir la perspective d’un agrandissement éventuel.

Telles furent les principales stipulations consacrées à Vienne, au sein des distractions les plus bruyantes et dans l’enivrement de confiance que la victoire laisse pour quelque temps après elle. L’affection réciproque des souverains, leur caractère personnel, la lassitude des peuples et des gouvernemens, la surveillance rigoureuse exercée sur la France, militairement occupée et subissant le traité du 20 novembre, sur l’Italie frémissante, et sur cette Pologne à laquelle on venait de rendre les moyens de se nuire à elle-même, et dont on irritait toutes les espérances sans en satisfaire aucune ; ce furent là les principales, on peut dire les seules garanties que reçut alors la paix du monde.

Pendant quinze ans, tout le travail des cabinets ne consista qu’à maintenir, contre les résistances intérieures, un état de choses fondé sur l’incertitude et la confusion de tous les principes. La sainte-alliance fit plutôt de la haute police que de la politique. La seule action qui s’y exerça d’une manière vraiment habile, fut celle de l’Autriche profitant des inquiétudes générales pour enchaîner la Russie au statu quo et s’assurer à elle-même la prépondérance dans les congrès des souverains. La France fut, et devait d’abord être tout entière au soin de se libérer des engagemens que lui avait imposés l’Europe, et de la tutelle exercée à Paris même par ses ambassadeurs réunis en conférence. Le malheur grandit un peuple autant que la prospérité ; et s’il n’est guère dans notre histoire d’époque plus triste, il n’en est pas de plus honorable que cette période des quatre années de l’occupation étrangère, suivie de la libération de notre territoire, du merveilleux rétablissement de nos finances et de notre prospérité. Il fut donné à la restauration de réparer des désastres dont elle n’était pas comptable, et de faire reprendre à la France cette attitude d’égalité que ses vainqueurs d’un jour inclinaient à lui refuser.

Son gouvernement ne porta dans la politique étrangère aucune vue ambitieuse et hardie ; ses embarras intérieurs et les méfiances jalouses de l’Europe l’en auraient empêché ; mais il tint à honneur d’intervenir dans toutes les grandes transactions, et, de fait, il n’en est pas une où le nom de la France ait été oublié ; il en est même, celles relatives à la Grèce, par exemple, où ce nom a pesé son juste poids. L’expédition de 1823 en Espagne offrait au gouvernement des Bourbons l’occasion de fonder sur des bases prudemment réformatrices un système