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DES PARTIS ET DES ÉCOLES POLITIQUES.

tout nouveau. Si Dieu et la prudence humaine qui entre dans ses voies, reculent de quelques années cette catastrophe imminente, la France s’avancera dans cette arène, qui ne sera peut-être qu’un congrès, avec une disposition d’esprit moins fiévreuse, des idées plus rassises, un souvenir moins vivant des violences révolutionnaires et des ambitions impériales. Les faits se seront étroitement enlacés aux idées, les doctrines seront lestées par le poids des intérêts, les questions comme les forces sociales auront mûri en Europe. L’unité de l’Italie ne sera plus un mot d’ordre reçu et passé sur la pointe d’un poignard ; l’Allemagne, sillonnée de chemins de fer, et où le bruit de l’industrie fait taire celui des armes, aura préparé par son unité commerciale des destinées qu’elle est aujourd’hui incapable de défendre comme de définir ; le vent du siècle aura fait des ruines de ce qui semble puissant encore ; le sol sera déblayé, et l’instant de la reconstruction sera proche. Alors le système auquel la France adhère en ce moment, comme à la condition même de son salut, aura accompli son œuvre ; alors des alliances nouvelles surgiront avec des besoins nouveaux.

Il y a dans la politique deux parties distinctes, mais que l’homme d’état doit combiner et maintenir dans une haute et constante harmonie ; une partie fixe, celle-là résulte des destinées d’un pays, du génie d’une race, et de la civilisation qui l’exprime ; une partie transitoire, qui régit tout ce qu’il y a d’accidentel dans le cours des choses humaines. L’homme politique pense toujours selon celle-là, alors même qu’il agit conformément à celle-ci. Il sait au besoin enrayer dans la voie du progrès, mais sans jamais aller à l’encontre ; il s’arrête devant les évènemens, mais ne garantit pas le présent en lui sacrifiant l’avenir.

C’est parce que nous croyons que le système suivi depuis cinq ans n’a blessé à mort aucune question vitale, et qu’en reculant les solutions, il les a rendues plus certaines, que nous lui donnons, en thèse générale, une adhésion dont l’opposition systématique est elle-même devenue complice. Elle aussi se défend aujourd’hui d’avoir jamais voulu la guerre européenne ; elle était animée des intentions les plus pacifiques en provoquant l’intervention en Pologne et en Italie, en prétendant obliger le ministère à garder Anvers, à prêter secours aux petits états allemands qui résisteraient aux résolutions de Francfort, souscrites par leurs gouvernemens.

La paix est maintenant si universellement appréciée comme un immense bienfait, qu’il n’y a guère plus à défendre l’homme à l’énergie duquel la France en est surtout redevable, et dont la vie s’est vite usée sous nos passions comme la barre de fer sous le marteau. Cet homme