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LE CHANDELIER.

JACQUELINE.

C’est bien, et vous pouvez compter que je ne serai pas ingrate. Avez-vous vu Fortunio ce matin ? où est-il ? j’ai à lui parler.

LA SERVANTE.

Il n’est pas venu à l’étude ; le jardinier, à ce que je crois, l’a aperçu. Mais on est en peine de lui, et on le cherchait tout-à-l’heure de tous les côtés du jardin. Tenez, voilà monsieur Guillaume, le premier clerc, qui le cherche encore ; le voyez-vous passer là-bas ?

GUILLAUME, au fond du théâtre.

Holà ! Fortunio ! Fortunio ! holà ! où es-tu ?

JACQUELINE.

Va, Madelon, tâche de le trouver.

(Madelon sort. Entre Clavaroche.)
CLAVAROCHE.

Que diantre se passe-t-il donc ici ? comment ! moi qui ai quelques droits, je pense, à l’amitié de maître André, il me rencontre et ne me salue pas ; les clercs me regardent de travers, et je ne sais si le chien lui-même ne voulait me prendre aux talons. Qu’est-il advenu, je vous prie ? et à quel propos maltraite-t-on les gens ?

JACQUELINE.

Nous n’avons pas sujet de rire ; ce que j’avais prévu arrive, et sérieusement cette fois ; nous n’en sommes plus aux paroles, mais à l’action.

CLAVAROCHE.

À l’action ? que voulez-vous dire ?

JACQUELINE.

Que ces maudits clercs font le métier d’espions, qu’on nous a vus, que maître André le sait, qu’il veut se cacher dans l’étude, et que nous courons les plus grands dangers.

CLAVAROCHE.

N’est-ce que cela qui vous inquiète ?

JACQUELINE.

Assurément ; que voulez-vous de pire ? Qu’aujourd’hui nous leur échappions, puisque nous sommes avertis, ce n’est pas là le difficile ; mais du moment que maître André agit sans rien dire, nous avons tout à craindre de lui.