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SCIENCES NATURELLES.

expriment l’un et l’autre la propriété qu’ont certains batraciens de s’enfler quand on les attaque, conviennent plus particulièrement aux crapauds, et cependant ils s’appliquent assez souvent à des grenouilles, à cause de l’habitude qu’ont les mâles, lorsqu’ils croassent, de faire sortir de chaque côté du cou une vessie gonflée d’air.

Le nom de calamite s’applique tantôt au crapaud des joncs pour lequel il a dû être inventé, tantôt à la grenouille verte, et quelquefois aussi à la rainette vulgaire. Pline le donne comme synonyme de diopètes. Cependant ce dernier mot, qui signifie tombée du ciel, n’indique ni une espèce ni un genre, et rappelle seulement une origine.

Les anciens, en effet, distinguaient par leur origine des batraciens de trois sortes : les uns provenant de parens semblables à eux-mêmes, d’autres naissant de la corruption et se formant de toutes pièces dans les marais lorsque le soleil du printemps en met la fange en fermentation, d’autres enfin tombant du ciel sur terre, ou naissant subitement sur la poussière des chemins, sous l’influence vivifiante d’une pluie d’été. Les premiers, disaient-ils, perpétuent leur race par les moyens ordinaires ; ils vivent plusieurs années, et à l’approche de l’hiver, ils vont chercher dans des trous profonds un asile contre le froid. Les autres ne durent qu’une saison, et à la fin de l’automne, ils se résolvent en limon pour renaître six mois plus tard. Les derniers enfin ont une existence plus courte encore et qui ne s’étend guère au-delà d’un jour.

Il n’y a aucune réflexion à faire relativement au premier mode de génération, et quant au second, il suffit de rappeler que jusque vers la fin du xviiie siècle, il était généralement admis, non-seulement pour le plus grand nombre des insectes, mais encore pour plusieurs petits mammifères. Depuis qu’il a été démontré que, dans la plupart des cas où l’on avait cru voir des animaux naissant de la corruption, il y avait réellement une filiation à la manière ordinaire, on n’a plus voulu admettre, pour aucun cas, de génération spontanée ; peut-être a-t-on raison, mais toujours est-il vrai que jusqu’à présent on n’est point parvenu à se rendre raison de l’apparition de certains animaux, notamment de celle de presque tous les vers intestinaux.

Pour ce qui est de la troisième origine, je dois dire qu’elle n’était pas admise par tous les anciens, et ainsi, un naturaliste de l’école observatrice, un disciple d’Aristote, Théophraste, croit qu’on s’était fait illusion sur ce point et montre d’où avait pu venir l’erreur. Son maître, je le pense, n’eût pas tranché ainsi la question, et de ce qu’on avait pu se tromper quelquefois, il n’eût pas conclu qu’on avait dû se tromper toujours.