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juillet. C’est un fourrage court et fin, d’une saveur exquise et d’un parfum délicieux, semblable à celui des prairies des Hautes-Alpes. Tous les prés des vallées sont destinés à être fauchés ; le bétail va paître dans les montagnes, à mesure que la neige les abandonne. L’herbe qui croît entre les rochers et la feuille des bouleaux nains lui fournissent une nourriture abondante et productive en lait. Dans tous les fields, il y a des huttes en troncs de sapins, assez semblables aux chalets, et qui ont la même destination. Le bétail de toute la paroisse voisine paît à l’entour, et vient y laisser son lait, qui se transforme en caillé, en beurre et en fromage. Ces chalets ou laiteries s’appellent cedres. Les blés commencent à pousser au milieu de juin ; en un mois ils s’élèvent de trois pieds et montent en épis. Une de leurs plus importantes récoltes est celle des feuilles d’arbre. Le tremble, l’aulne et le bouleau leur fournissent une abondante moisson. Dès le milieu d’août, les femmes et les enfans se mettent à l’ouvrage ; les uns grimpent sur les arbres, et, passant leurs mains sur les branches dans le sens opposé aux feuilles, font pleuvoir de tous côtés les seuls fruits que leur accorde leur climat ; les autres en emplissent de grands sacs, qu’ils vont vider sur les greniers. Ils entassent ces feuilles sans leur donner le temps de sécher ; le fourrage lui-même est rentré dans un état d’humidité complète. Pour profiter de la récolte des feuilles, le paysan détruit autant que possible, dans son voisinage, les pins et les sapins. Pour défricher une forêt, on abat sans distinction tous les arbres, en les coupant à deux ou trois pieds de terre. Ils restent une année couchés sur le sol, puis on y met le feu. La cendre du bois, des feuilles et de la mousse, enrichit la terre, qui, dès la seconde année, est toute revêtue d’une herbe épaisse. Les troncs de pins périssent promptement et ne donnent pas de rejetons ; mais les bouleaux envahissent à l’instant le terrain. Le cultivateur se borne à les éclaircir, pour favoriser l’herbe étendue à leurs pieds, et les respecte en faveur de leur utilité. Le bouleau donne le meilleur bois de chauffage du pays ; son écorce sert à couvrir les maisons. Lorsqu’on a recouvert de lattes les chevrons qui forment le toit, on lève sur le tronc des bouleaux des lanières d’écorce de dix à douze pieds de long sur un pied de large, et on les étend sur la toiture. Cette couverture est imperméable à