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Mazarin, que je continuerai tant qu’il gouvernera, si je me trouve en état de le faire. » Tallemant a employé trois ans à rédiger ses Historiettes, car il les termine par le récit du procès du marquis de Langey, jugé en 1659. Les mémoires de Tallemant contiennent, il est vrai, quelques faits postérieurs à cette époque, mais ces faits sont écrits dans des additions à la marge du manuscrit, que les éditeurs ont rétablies dans le texte. Nous ne croyons pas, au reste, qu’aucune de ces additions soit relative à des faits plus récens que les années 1665 ou 1666.

Rien n’établit jusqu’à présent que Tallemant ait mis à exécution le projet d’écrire les Mémoires sur la régence qu’il semblait promettre[1]. Les recherches les plus étendues dans toutes les bibliothèques de Paris n’ont eu à cet égard aucun résultat.

Dès leur apparition, les Mémoires de Tallemant ont été l’objet d’éloges et de critiques également outrés. Les partisans de ce qu’on est convenu d’appeler le progrès, y ont applaudi ; ils ont cru y voir une sorte de niveau passé sur ces hautes existences dont les reflets jettent encore de l’éclat sur notre société moderne ; ceux qui gémissent du bouleversement des idées sur lesquelles reposent les sociétés, ont cru y voir le ravalement de la noblesse et du haut clergé, ainsi que la dégradation des mœurs du vieux temps, et ils ont repoussé avec une sorte d’indignation un livre qui, à leurs yeux, dépouillait le passé de ses enchantemens. Nous n’acceptons ni ces éloges ni ces blâmes ; nous répondrons aux uns comme aux autres que si Tallemant a dévoilé de basses intrigues et de misérables faiblesses de personnages illustres, il a seulement rapproché de notre vue ce que nous sommes accoutumés à ne regarder que d’un point éloigné. Peintre des scènes vulgaires de la société, il rassemble les traits épars jusqu’ici dans des recueils rarement consultés. Rien dans les récits de Tallemant n’étonnera ceux qui ont parcouru les vaudevilles, les ponts-bretons et les chansons dont nos sottisiers fourmillent, où de scandaleuses anecdotes sont reproduites avec un cynisme révoltant dans des couplets dont

  1. Tallemant paraît au moins avoir commencé ce travail, car il y a plusieurs fois renvoyé positivement.