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tes, Vingt siècles de gloire, une Soirée en 1682, l’Apothéose de Van Speyck. Ses poèmes se composent de pièces détachées et d’idylles académiques auxquelles il faut joindre des traductions de Byron et des légendes au nombre de quatre : le Château de Ter Lude, Adgille, Jacqueline et Berthe, le Combat contre les Flamands[1].

Les publications à gravures et à vil prix, connues sous le nom de pittoresques, ont commencé à déborder dans la Hollande. Les digues et les polders se sont trouvés impuissans contre elles. C’est le trop plein de Paris qui s’écoule de ce côté, après avoir subi toutefois le remaniement de la traduction. Comme tout le monde sait lire dans les états du roi Guillaume, il en résulte que ces compilations obtiennent un succès assez lucratif pour leurs éditeurs.

Je terminerai ici cet aperçu de l’état des arts en Hollande. Comme partout, on y a vu la conscience et le talent de quelques hommes de choix luttant contre l’indifférence et le mauvais goût, et cherchant à empêcher l’idée commerciale et bourgeoise d’éteindre la dernière lueur du sentiment artiste ; le sculpteur renfermé dans son atelier, au milieu des plâtres antiques, pleurant sur le cercueil de briques où repose l’architecture morte ; le peintre cédant quelquefois, pour vivre, à la mesquinerie de son temps, mais d’autres fois aussi fuyant dans les forêts, ou plantant son chevalet au milieu des bricks et des goélettes pour brûler son dernier grain d’encens aux pieds de l’éternelle nature, sa déesse unique et souveraine ; le poète enfin, rompant sa dernière lance contre les pittoresques et les tra-

  1. L’auteur est un jeune homme de beaucoup d’esprit, qui parle très couramment notre langue. Ses succès littéraires et scientifiques lui ont valu la décoration du lion des Pays-Bas, décoration qui a conservé le privilège, fort rare aujourd’hui, de n’être donnée qu’à des gens de mérite. M. Van Lennep m’a révélé un fait que je dois consigner ici, c’est que la langue hollandaise du moyen-âge est absolument la même que l’ancienne langue islandaise. M. Van Lennep comprend comme son propre idiome tous les écrits qui nous sont restés de ce peuple intéressant.

    Ceci me rappelle que dans un voyage récent à l’est de l’Europe j’entendis parler, au fond de la Transylvanie, l’ancienne et pure langue saxonne, qui s’est conservée parmi plusieurs peuplades des monts Carpathes. Si notre savant et illustre historien Augustin Thierry avait eu connaissance de ce fait, quelques centaines de lieues lui eussent épargné peut-être bien des études et des veilles.