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REVUE DES DEUX MONDES.

je suis un honnête homme, mon nom est Polacco ; Polacco n’est pas un mendiant. Par saint Mathieu ! mendiant n’est point un mot qu’on puisse appliquer à Polacco.

ULRIC.

Expliquez-vous, et ne vous offensez pas de ce que je vous demande qui vous êtes.

POLACCO.

Hé, hé ! point d’offense ; il n’y en a pas. Nos jeunes garçons vous le diront. Qui ne connaît pas Polacco ?

ULRIC.

Moi, puisque j’arrive de Bohême, et que je ne connais personne.

POLACCO.

Bon, bon, vous y viendrez comme les autres ; on est utile en son temps et lieu, chacun dans sa petite sphère ; il ne faut pas mépriser les gens.

ULRIC.

Quelle estime ou quel mépris puis-je avoir pour vous, si vous ne voulez pas me dire qui vous êtes ?

POLACCO.

Chut ! silence ! la lune se lève ; voilà un coq qui a chanté !

ULRIC.

Quelle mystérieuse folie promènes-tu dans ton bavardage ? Tu parles comme la fièvre en personne.

POLACCO.

Un miroir, un petit miroir ! Dieu est Dieu, et les saints sont bénis. Voilà un petit miroir à vendre.

ULRIC.

Jolie emplette ! il est grand comme la main, et cousu dans du cuir. C’est un miroir de sorcière bohémienne ; elles en portent de pareils sur la poitrine.

ROSEMBERG.

Regardez-y ; qu’y voyez-vous ?

ULRIC.

Rien, en vérité ; pas même le bout de mon nez ; c’est un miroir magique ; il est couvert d’une myriade de signes cabalistiques.

POLACCO.

Qui saura verra, qui saura verra.