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DÉBATS SUR LE CHRISTIANISME.

la foi ; puis, la foi ayant changé l’état de l’âme et de l’esprit, de donner à l’esprit devenu docile une satisfaction théorique par une explication rationnelle du système chrétien. Ainsi mépris de la raison, excitation de l’ame et joug de la foi, élévation de l’intelligence admise à comprendre un dogme imposé.

Cette méthode a paru hérétique à l’orthodoxie de l’église officielle. M. l’évêque de Strasbourg a pris la défense de la raison contre le prêtre platonicien ; il paraît que le vénérable prélat ne connaît point les démonstrations de Kant et de Platon sur l’impossibilité d’édifier certaines vérités par le seul raisonnement qui peut prêter son secours à toutes les opinions humaines, à l’erreur aussi bien qu’à la vérité. M. Bautain a donc été condamné par son supérieur immédiat. Rome a été plus discrète, et s’est abstenue d’une improbation positive.

Trois résultats nous semblent ressortir de la correspondance religieuse publiée par M. Bautain. Des juifs se sont convertis au christianisme ; c’est bien. Mieux vaut être chrétien que juif ; l’esprit et l’ame sont plus développés par l’adhésion au Nouveau Testament que par le culte exclusif de l’Ancien. Les Israélites qui se convertissent à l’Évangile ressemblent à des retardataires qui, dans la marche du genre humain, pressent enfin le pas pour rejoindre le gros de l’armée.

Il est clair aussi, par la nouvelle publication, que l’enseignement officiel de l’église est désormais impuissant à conquérir de nouveaux croyans. En effet, rien de plus fastidieux et de plus inutile pour la nourriture de l’esprit et de l’ame que la théologie scolastique enseignée dans nos séminaires. Aussi tout ce qui a un peu de force et d’intelligence s’en écarte, et pour mieux défendre le christianisme, on abjure l’orthodoxie ecclésiastique.

Enfin M. Bautain a démontré par sa correspondance qu’il y avait au fond du christianisme un beau système rationnel. Nous remercions le prêtre professeur de cette démonstration, car elle tourne tout-à-fait au profit de la philosophie. Si le christianisme peut être expliqué philosophiquement, il n’est donc autre chose qu’une phase de la philosophie même de l’esprit humain. Oui, il y a dans le christianisme un faisceau de traditions et de croyances inhérentes à l’humanité et à son histoire ; il y a vérité,