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REVUE DES DEUX MONDES.

Console-moi ce soir, je me meurs d’espérance ;
J’ai besoin de prier pour vivre jusqu’au jour.


LE POÈTE.

Est-ce toi dont la voix m’appelle,
Ô ma pauvre Muse, est-ce toi ?
Ô ma fleur ! ô mon immortelle !
Seul être pudique et fidèle
Où vive encor l’amour de moi !
Oui, te voilà, c’est toi, ma blonde,
C’est toi, ma maîtresse et ma sœur !
Et je sens dans la nuit profonde,
De ta robe d’or qui m’inonde,
Les rayons glisser dans mon cœur.


LA MUSE.

Poète, prends ton luth, c’est moi, ton immortelle,
Qui t’ai vu cette nuit triste et silencieux ;
Et qui, comme un oiseau que sa couvée appelle,
Pour pleurer avec toi, descends du haut des cieux.
Viens, tu souffres, ami. Quelque ennui solitaire
Te ronge ; quelque chose a gémi dans ton cœur ;
Quelque amour t’est venu, comme on en voit sur terre,
Une ombre de plaisir, un semblant de bonheur.
Viens ! chantons devant Dieu ; chantons dans tes pensées,
Dans tes plaisirs perdus, dans tes peines passées,
Partons, dans un baiser, pour un monde inconnu.
Éveillons au hasard les échos de ta vie,
Parlons-nous de bonheur, de gloire, et de folie,
Et que ce soit un rêve, et le premier venu.
Inventons quelque part des lieux où l’on oublie ;
Partons, nous sommes seuls ; l’univers est à nous.
Voilà la verte Écosse, et la brune Italie,
Et la Grèce, ma mère, où le miel est si doux ;
Argos, et Ptéléon, ville des hécatombes,
Et Messa la divine, agréable aux colombes ;
Et le front chevelu du Pélion changeant ;