Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 2.djvu/654

Cette page a été validée par deux contributeurs.
648
REVUE DES DEUX MONDES.

sirs de la foule. Elles paraissaient la tête découverte, et souvent, chose incroyable ! se montraient tout-à-fait nues. Elles nageaient ainsi devant les spectateurs, dans une espèce de cuve ou de bassin placé sur le bord de l’orchestre. « Chrétiens, s’écriait saint Chrysostôme, chrétiens qui venez de voir Jésus-Christ crucifié ! vous quittez l’église et vous courez voir des femmes qui nagent et qui déshonorent leur sexe ! ah ! fuyez cette piscine théâtrale !…[1]. »

Remarquez-vous l’amertume de cette apostrophe : « vous quittez l’église ! » Les Pères de la fin du ive siècle se plaignent sans cesse, et avec un dépit profond, de la préférence que beaucoup de nouveaux chrétiens donnaient alors aux jeux scéniques sur les saintes liturgies. Saint Chrysostôme, entre autres, a consacré plusieurs homélies à déplorer l’abandon que les fidèles faisaient souvent de l’église pour courir au cirque. Enfin le 83e canon du 4e concile de Carthage punit de l’excommunication ceux qui, les jours de fêtes, quitteraient les églises pour les spectacles.

Le nombre des pantomimes à Rome, au ive siècle, est à peine croyable. Ammien Marcellin rapporte, comme une chose honteuse aux Romains, que, sous le règne de Constance, on fut obligé, dans la crainte de la famine, de faire sortir de Rome tous les étrangers qui professaient les arts libéraux, et que l’on conserva, sans les inquiéter, six mille pantomimes[2].

Drame parlé.

Indépendamment de ces spectacles muets, y eut-il au ive siècle des drames parlés ? y eut-il des mimes, ou farces improvisées ? y eut-il des comédies et des tragédies proprement dites ? Pour répondre à la première de ces questions, il suffit de jeter les yeux sur les écrits des saints Pères. Leurs invectives et leurs reproches ne s’adressent pas moins au mal que les chrétiens commettent sur les gradins des théâtres par le sens de l’ouïe, que par celui de la vue.

« Les chants obscènes, dit saint Jean Chrysostôme, sont aussi

  1. Homil. vii, in Matth.
  2. Hist. lib. xiv