Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 2.djvu/653

Cette page a été validée par deux contributeurs.
647
LA COMÉDIE AU IVe SIÈCLE.

THÉÂTRE PUBLIC.
Drame muet.

Je m’étendrai peu sur le théâtre muet, sur les ballets des pantomimes. Ce genre de spectacle avait conservé au ive siècle le même éclat qu’aux iie et iiie siècles, alors qu’Apulée décrivait avec tant de grace ce charmant ballet des Amours de Vénus et de Mars, qui semble le programme d’un de nos ballets modernes[1], programme écrit comme il serait à souhaiter que le fussent plus souvent les nôtres. Si vous désirez plus de détails sur l’extrême perfection où s’était maintenu cet art, ouvrez Libanius et lisez le long discours qu’à l’exemple de Lucien il a consacré aux pantomimes. La précision, la grace, le sentiment exquis du beau, empreint dans tous leurs mouvemens et tous leurs gestes, lui font comparer les pantomimes aux statuaires ; et, en rhéteur peu judicieux, il préfère l’art fugitif et instantané des premiers à l’art durable et presque éternel des seconds : « Le statuaire, dit-il, imite la beauté des formes et les mouvemens des passions au moyen du marbre ; c’est avec ses propres membres que le pantomime parvient à les exprimer. Chaque pose du danseur est une statue d’un moment à laquelle une autre statue succède. » Toutes les exagérations de louanges dont on accabla les pantomimes, dans les ier, iie et iiie siècles, nous les retrouvons dans les poètes et les écrivains des ive et ve siècles. Voyez dans quels termes parle des pantomimes un poète du temps de Théodose, Nonnus de Panopolis, dans le livre 8 de ses Dionysiaques : « Ce sont des gestes qui ont un langage, des mains qui ont une bouche, des doigts qui ont une voix. »

Bien que l’usage du masque permît aux pantomimes romains de jouer indifféremment des rôles d’hommes et de femmes, il y eut cependant au ive siècle des actrices pantomimes. L’incroyable licence de cette époque rendait la présence des femmes nécessaire aux plai-

  1. Âne d’or, liv. x.