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CONTEMPLATION.

Ah ! pour nous reposer, viens, descendons aux cieux[1].
Qu’ils sont beaux dans la nuit et dans la solitude !
Comme ils invitent l’ame à leur tranquille étude !
Aussi de l’Orient les antiques pasteurs[2]
Élevèrent d’abord leurs yeux contemplateurs
Vers ce ciel qu’ils voyaient comme une roue immense,
Dont chaque soir, sans bruit, la course recommence,
Et dont les feux, versant un éclat pâle et pur,
Leur semblaient des clous d’or sur un plafond d’azur ;
La Grèce vit plus tard l’astre que la nuit voile
S’endormir chaque soir avec une autre étoile,
Les planètes en chœur s’avancer, s’arrêter,
Retourner en arrière ou se précipiter,
Ainsi qu’entrelaçaient leurs danses fortunées
Les vierges d’Éleusis ou des panathénées ;
Elle vit, déplaçant son lit à l’horizon,
Le soleil éveiller l’une ou l’autre saison,
Traçant sur l’écliptique une route assurée,
Son pas changer des nuits la longueur mesurée,
Et, comme autour du monde il voyage en un jour,
Dans les cieux, de l’année accomplir le grand tour.
Moi-même, abandonnant mes sens à l’apparence,
À ces illusions j’aime à donner créance ;
J’aime à m’imaginer la terre des mortels,
Centre du mouvement des globes éternels,
Immobile et laissant, comme une jeune reine,
Ses mille astres former sa pompe souveraine.
Mais la science parle, et sa sévère voix[3]
Me dit que rien n’est vrai de tout ce que je vois.
La main de Copernic a brisé le prestige ;
En dépit de mes sens, je le crois, ô prodige !
Et perçant le bandeau dont mes yeux sont couverts,

  1. L’uranologie, ou science du ciel.
  2. L’uranographie, ou description des mouvemens apparens des astres.
  3. L’héliostatique, ou explication des mouvemens réels des astres, en supposant le soleil immobile au centre de notre système planétaire.