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hommes dévoués à la prédominance catholique, en revanche, Bruxelles, Namur, Liége et le Luxembourg nomment des députés libéraux. Ce qui contribue principalement à assurer la majorité aux premiers, c’est que les élections sont faussées dans leur principe. On a voulu combiner le vote indirect, qui était le mode d’élection dans l’ancien royaume des Pays-Bas, avec le vote direct, usité dans les pays constitutionnels, et l’on est arrivé à une représentation qui n’est pas exacte. Par exemple, dans l’ancien gouvernement, l’élection était faite par les états provinciaux, composés de députés de la noblesse des villes et des campagnes. Les villes étaient représentées à part. Le cens électoral de celles-ci n’avait aucun rapport avec celui des communes rurales, et les communes votant par canton, le cens d’un canton demeurait indépendant de celui du canton voisin. Aussi les quotités s’établissaient-elles de manière à faire concourir à chaque élection un nombre suffisant d’électeurs, et à éviter un trop grand concours. Ainsi, le cens de telle grande ville était de 400 francs, celui de tel village seulement de 25 francs. Dans la nouvelle loi électorale, on a conservé cette diversité du cens et rendu l’élection directe par le concours de tous les électeurs d’un arrondissement. Les législateurs belges ont puisé ce principe vicieux dans l’arrêté du gouvernement provisoire qui réglait les élections au congrès.

C’est principalement dans les Flandres que le parti catholique se rend maître des élections, par l’influence qu’il exerce sur les habitans des campagnes. Ces votes dévoués et aveugles constituent une majorité compacte et inébranlable, contre laquelle vient se briser le vote des villes.

Quand le jour de l’élection est arrivé, les chefs-lieux voient accourir dans leurs murs, de tous les points de l’horizon, de petites troupes de paysans, conduites par des hommes en soutane, qui marchent le front rayonnant et la canne à la main. Ce sont les villages qui viennent voter, avec leurs curés en tête. Arrivés aux salles d’élection, les curés embataillonnent leurs ouailles comme un sergent aligne ses recrues, par rang d’intelligence, les plus grands les premiers, et, derrière les plus petits. Puis ils leur répètent la harangue de la veille, et leur distribuent sur des cartes le nom