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CHANTS DE L’ITALIE.


Et de faire répondre par la Samaritaine :


Vado per acqua, per beve e cucina…


Telle est encore la chanson si connue que fit, la veille de son exécution, un prisonnier napolitain, condamné comme conspirateur :


Un piu a soffrir mi resta…


Après avoir parlé de l’invention des mélodies, et avant de m’arrêter aux livres, aux histoires et aux traditions du peuple qui se rattachent immédiatement à ses chants, il nous reste à jeter un coup d’œil sur la manière toute particulière dont il les exécute.

Les hommes, en Italie, chantent ordinairement avec la voix de fausset, et partagent, avec plusieurs habitans des contrées de l’Allemagne, l’habitude de chanter du nez. Mais ils ont en outre une singularité qui ne leur est commune avec aucun autre peuple ; c’est de prolonger le dernier ton, pendant trois, quatre, six mesures, quelquefois aussi long-temps que le ritornello lui-même. J’ai entendu dans les environs de Terracine et de Capoue des paysans occupés de leurs travaux, traîner ainsi le dernier ton d’une manière désespérante et jusqu’à perdre haleine. Il est inconcevable qu’un peuple qui montre tant de goût naturel dans l’invention de ses mélodies, puisse se plaire dans une pareille uniformité, et s’attacher avec tant de persévérance à une pareille monotonie, à moins toutefois que cela ne provienne de l’habitude qu’il a de soutenir ce ton, pendant que l’instrument qui l’accompagne d’habitude exécute une coda ou un ritornello.

Le caractère mélodique est quelquefois très difficile à saisir et se refuse tout-à-fait à la notation régulière. Autant de peuples, autant de caractères différens dans leurs mélodies. Il en est du chant comme des divers dialectes de la langue. Il faut quelque habitude pour savoir saisir les tons primitifs de la mélodie et les distinguer des tons accidentels qui varient suivant les chanteurs. C’est à cette cause qu’il faut attribuer les diverses opinions des voyageurs sur les chants populaires ; les uns en effet n’ont pu saisir aucune mélodie au milieu de toutes ces fioritures, de tous ces tons traînés ;