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LE POÈME DE MYRZA.

gageaient, au nom de je ne sais quel nouveau dieu, à nous abandonner à notre appétit ; et la veille, d’autres nous disaient d’être esclaves d’un seul maître : les uns fixent la chasteté d’une femme au nombre de sept maris, les autres veulent qu’elle n’en ait point, nous ne savons plus à qui entendre. Mais ce que dit cette Myrza nous plaît, elle nous amuse et ne nous enseigne point. Que ses fautes soient oubliées, et qu’elle soit vêtue d’une robe de pourpre, pour être conduite au temple du Destin qui est le dieu des dieux.

Et comme les disciples des prophètes furieux s’acharnaient à la maudire et ramassaient de la boue et des pierres, le peuple prit parti pour elle, et voulut la porter en triomphe. Mais elle se dégagea, et montant sur le dromadaire qui l’avait amenée, elle dit à ce peuple en le quittant : Laissez-moi partir, et si ces hommes vous disent quelque chose de bon, écoutez-le, et recueillez-le de quelque part qu’il vienne. Pour moi, je vous ai dit ma foi, c’est l’amour. Et voyez que je suis seule, que j’arrive seule, et que je pars seule… Alors Myrza répandit beaucoup de larmes, puis elle ajouta : Comprenez-vous mes pleurs, et savez-vous où je vais ?


Et elle s’en alla par la route qui mène au désert de Thébaïde.


George Sand.