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la femelle du coucou qui vient faire elle-même cette exécution, et qui dévore les jeunes oiseaux. Au reste, il y a des versions très différentes sur ce sujet, car l’on prétend aussi que le jeune coucou est lui-même le meurtrier de ses frères adoptifs, soit qu’il les étrangle quand il est assez fort, ce qui est l’opinion de plusieurs personnes, soit qu’il les fasse seulement mourir de faim, en accaparant toute la nourriture qui arrive au nid. Quoi qu’il en soit, on ne peut s’empêcher de reconnaître dans le coucou beaucoup de prévoyance, puisque, se sentant incapable de protéger convenablement ses petits, il trouve moyen de les faire garder à d’autres. Il n’a pas en effet assez de courage pour les défendre lui-même, et il fuit devant des oiseaux d’une taille bien inférieure à la sienne.

Ce n’est pas à une seule espèce d’oiseaux que le coucou confie le soin de sa progéniture ; on le voit choisir tantôt le verdier, qui fait son nid sur les plus grands arbres, et tantôt l’alouette, qui le construit à terre ; quelquefois c’est à la fauvette qu’il s’adresse, mais le nid du ramier est celui qu’il paraît préférer pour y déposer son œuf.

Quand approche l’époque où le coucou disparaît, c’est-à-dire vers le lever de la canicule, il change de couleur et fait entendre plus rarement sa voix.

Voilà en somme ce que dit Aristote des habitudes du coucou, et ce que Pline a copié à sa manière, c’est-à-dire en répétant à peu près les mêmes phrases, et les ajustant de manière à ce qu’elles fassent un sens tout différent ; établissant par exemple, dès le début, que le coucou est un épervier métamorphosé, puis reproduisant sur-le-champ les faits qui ont servi au naturaliste grec à prouver que ce sont deux oiseaux différens. Afin qu’on voie jusqu’à quel point l’écrivain romain sait défigurer un texte, je donnerai ici le passage principal dans lequel il parle du coucou ; mais je ferai remarquer auparavant qu’il n’a pas su de quel oiseau Aristote a voulu parler ; il s’est contenté d’écrire en lettres latines le nom grec ϰοϰϰοξ (kokkox), et sans se douter qu’il y eût rien de commun entre le cuculus d’Italie et le coccyx de Grèce.

« Le coccyx, dit-il, paraît n’être autre chose qu’un épervier qui a changé de figure ; en effet, quand on a vu les premiers, les autres disparaissent au bout de peu de jours. Le coccyx lui-même