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HISTOIRE DE FRANCE.

avec sa manière de vivre et ses coutumes rustiques, et la Bourgogne avec ses abbayes et ses coteaux fertiles, et le midi avec son ardeur de tempérament et sa vivacité d’esprit, et toutes ces provinces de l’est et du nord, du centre et des extrémités, éveillées comme par une voix magique, semblent être sorties du vieux tombeau où elles dormaient, pour revêtir encore leurs anciens costumes et revivre debout devant nous.

J’aurais voulu seulement que l’auteur, pendant qu’il avait sa baguette de fée à la main, ne passât pas si rapidement sur certains pays, sur la Franche-Comté, par exemple. N’y avait-il point d’autres notions à nous rapporter sur cette province, tour à tour si fortement marquée du sceau de la puissance romaine et du mystique cachet du moyen âge ? N’y avait-il rien de plus à nous dire de cette ville de Besançon, dont l’histoire commence à Jules César, et se termine à Louis xiv, en passant par le gouvernement de Philippe ii et les auto-da-fé du duc d’Albe ? de cette ville libre comme Nuremberg, placée sous la protection de l’empire comme Strasbourg, reine par son archevêché comme Mayence, et gouvernée par des bourgeois comme les villes qui achetèrent leur affranchissement de Louis-le-Gros[1] ? À une demi-lieue de là, vous verriez la chapelle de saint Ferréol et de saint Ferjeux qui implantèrent la religion chrétienne en Séquanie, et s’en allèrent jusque là-bas, au lieu où ils sont enterrés, portant leurs têtes sur leurs mains, après qu’on les eut martyrisés ; à quelques lieues plus loin, Luxeuil, la retraite de saint Colomban, et en s’avançant vers le nord, en pénétrant dans nos montagnes, on retrouverait sous le toit du chalet, les mœurs hospitalières, la franchise, les coutumes et la religion des anciens Suisses ; tandis qu’un peu plus bas, Salins, Poligny, Nozeroy, Pontarlier, jadis villes seigneuriales, maintenant pauvres petites villes, vous offriraient encore un souvenir de leurs vieilles gloires, un reste de leurs vieilles croyances.

Quoi qu’il en soit de ce regret un peu vaniteux de Franc-Comtois, c’est un heureux point de départ, dans l’histoire de notre civilisation, que cette division des provinces ; après avoir vu comment

  1. C’était, pour me servir d’une expression de Wordsworth, une cité vierge, libre et brillante : She was a maiden city, bright and free.