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LES INDIENS DE LA PAMPA.

de leurs maris : aussi ne m’ont-elles pas semblé regretter beaucoup le désert. Pour les Indiens, ils furent égorgés par représailles ; mais il y a, à propos de ces vengeances, un fait odieux : les sauvages ont l’horrible habitude de faire des brides, des ornemens pour leurs chevaux, avec la peau des blancs, artistement tressée. Un des généraux de la province de Cuyo a cru devoir, lui aussi, parer son cheval d’un semblable trophée de cuero de Indio.

Ces trois divisions devaient, en marchant vers le sud, se rencontrer, et ainsi réunies, étendre leurs opérations, et affaiblir considérablement les Indiens. Mais ce projet ne fut point mis à exécution. La révolution, survenue en juin à Cordova, obligea Reynafé à quitter l’armée et à revenir avec ses troupes, déjà un peu diminuées par les désertions. Ruiz resta seul avec une très faible division, se dévoua pendant quelque temps à la cause commune et finit par ramener ses auxiliaires à San Luis. D’un autre côté, Rosas fut rappelé à Buenos-Ayres par des troubles alarmans pour son parti : il avait bien prévu qu’on tenterait un mouvement en son absence. Aldado rétrograda vers Mendoza ; de toutes parts on semblait pressentir de nouveaux malheurs, une guerre civile plus sanglante et plus générale que la dernière, et une coalition des Indiens.

Le Chaco, grand désert qui s’étend depuis le Rio Bernejo jusqu’aux environs de la ville de Santafé, est redevenu, depuis l’expulsion des Espagnols, la possession d’autres Indiens, ennemis jurés de ceux de la Pampa. Dans ce même temps, ils bloquaient étroitement Santafé ; la route par terre était interceptée ; les dépêches envoyées à Buenos-Ayres s’expédiaient par le Parana jusqu’au village du Rosario. Pendant la guerre que les Santafesinos, les pirates de la république, au dire de leurs voisins, soutinrent d’une manière si brillante contre Buenos-Ayres et Cordova, le gouverneur Lopez s’était servi de ces Indiens ; mais ils sont redevenus ennemis après le partage du butin, et enlèvent les habitans à deux milles de la ville.

Ces armées, levées à grands frais, ces formidables préparatifs, habilement combinés ; en un mot, cette expédition manquée peut avoir de très fâcheux résultats : elle a montré à toutes ces républiques leur faiblesse partielle et la presque impossibilité d’une union