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celle des peuples du nord de l’Europe comparés à ceux des pays méridionaux.

La principale occupation de l’Indien en temps de paix est de travailler son cheval, et le gaucho même peut à peine rivaliser avec lui. Il est vrai que celui-ci ne se donne pas la peine de préparer de longue main l’éducation d’un jeune animal qui, avant le moment où on lui pose un recado sur les épaules, a vécu libre et errant : en deux jours le gaucho a dompté un potro ; l’Indien fait plus, il le dresse. Pendant les chaleurs de l’été, quand le soleil, presque perpendiculaire, darde ses feux sur une plaine nue et dépourvue d’arbres, le cavalier de la Pampa jette son poncho sur le dos de son cheval, le fait se tendre, s’alonger, puis s’endort tranquillement sous cet abri improvisé ; si l’animal veut faire un mouvement, il gratte du pied pour éveiller son maître. S’agit-il de se préparer au combat, sans autre selle qu’une gerga, sans autre étrier qu’un os suspendu à une corde de cuir, le cavalier s’élance à toute bride, malgré un terrain souvent humide et glissant, pique subitement sa lance en terre, fait volter deux ou trois fois son cheval autour de l’arme sans la quitter, et se renversant sur le côté opposé, revient avec la même impétuosité, pour s’arrêter court. Le mors dont il se sert, emprunté aux gauchos, est, il est vrai, de nature à faire obéir l’animal le plus fougueux : quelquefois c’est une simple rienda passée dans la bouche, comme font nos postillons quand ils mènent leurs chevaux à l’abreuvoir.

On conçoit que cette manière de dresser un cheval doit le mettre bien vite hors de service ; mais dans les guerres, celui de la Pampa a un avantage inappréciable sur la cavalerie ennemie, étant plus habitué au sol moins sec des contrées méridionales. Il ne pleut que bien rarement en hiver dans les provinces de l’intérieur, surtout du côté du nord ; mais plus on s’avance vers le cap Horn, et plus cette pointe triangulaire qui forme l’extrémité du continent de l’Amérique du Sud, se trouve exposée au vent des deux océans, et par conséquent aux brouillards et aux pluies qui en résultent.

Les femmes indiennes s’occupent à faire des ponchos, des gergas. On est étonné de la finesse de leur travail, de la variété et de l’éclat des couleurs, et même de la précision des dessins, bien qu’ils soient assez grossiers. Le tissu est en général plus serré que