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REVUE. — CHRONIQUE.

comportent. La nature humaine, par bien des côtés exorbitans, échappe, ce nous semble, et pour son malheur, à cette simple, chaste et indulgente théorie. Mais il est bien de l’offrir, de la rappeler dans toute son intégrité aux âmes modérées, auxquelles elle est suffisante ; il est bien surtout d’en faire le premier enseignement, et comme le premier tableau au fond des pures et jeunes âmes ; car elles y reviendront avec fruit, elles s’en ressouviendront un jour.

— Nous signalerons dans le Dictionnaire de Physique générale, publié par Mame (rue Guénégaud, 23), un article Alchimie, de M. Gilbert, l’ancien ami et éditeur du théosophe Saint-Martin. Les amateurs des sciences occultes, s’il en est encore, les personnes plus positives qui tiennent à en constater la bibliographie et l’histoire, y trouveront de curieuses indications données par un homme qui semble avoir, sinon pénétré le secret, du moins tourné de près à l’entour.

— Les dernières livraisons de l’Encyclopédie pittoresque¸ publié par Lachevardière (rue du Colombier), contiennent de remarquables articles, Arianisme, Aristote, où l’on reconnaît la pensée philosophique profonde et la plume énergique de M. Pierre Leroux, à qui cette encyclopédie est déjà redevable, ainsi qu’à M. Jean Reynaud, de tant d’articles importans. En restant fidèles et exacts dans les exposés historiques, MM. Leroux et Reynaud savent produire les idées très neuves et dignes du plus sérieux examen, avec lesquelles ils envisagent l’histoire de la philosophie et du christianisme.

M. Paulin Paris, poursuivant ses utiles travaux sur la littérature française au moyen-âge, nous a donné, après le roman de Berthe-aux-grands-pieds, dont nous avons parlé en son temps, le Romancero français, ou Choix des chansons des anciens trouvères (Teschener, place du Louvre, 12), que nous n’avons pas annoncé encore. Ce recueil, composé avec le soin et le goût qui distinguent le spirituel érudit, est un agréable bouquet de nos plus vieilles romances, dont la fraîcheur et la délicatesse se révèlent pour la première fois depuis des siècles. Des notes discrètes et essentielles rendent cette lecture facile ; des notions sur les auteurs connus ou présumés la rendent souvent piquante et toujours instructive. Ces chansons et romances appartiennent à la fin du xiie et au commencement du xiiie siècle. Les trouvères sont la plupart des princes et des rois ; Jean de Brienne, roi de Jérusalem, Charles d’Anjou, frère de Saint-Louis et roi de Sicile, Pierre de Dreux, dit Maucler, comte de Bretagne : mais Queenes de Béthune, l’un des ancêtres de Sully, et Audefroi-le-Bâtard, paraissent les plus anciens. La plupart des sujets de leurs chants sont des complaintes d’amour et de chevalerie. Un coloris vif, une naïveté mêlée de sensibilité,