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REVUE. — CHRONIQUE.

MM. Grégoire et Collombet continuent avec persévérance et zèle leurs publications et traductions des pères de l’Église des cinq premiers siècles. Après Salvien, que nous avons dans le temps annoncé à nos lecteurs, voici cette fois saint Vincent de Lérins et saint Eucher de Lyon[1]. Le Commonitoire de saint Vincent de Lérins est un des livres les plus cités et les plus considérables de cette époque chrétienne, et dans lequel les points importans de dogme et de doctrine sont le mieux éclaircis. L’unité dans l’Église et une sorte de progrès au sein de cette unité y sont admirablement posés. En général toute cette école de Lérins cherchait à concilier le plus d’intelligence et de liberté avec la grâce et la foi : Vincent de Lérins en est un des plus éloquens organes. Quant à Eucher, ses lettres ou traités sur la Louange du Désert et sur le Mépris du Monde forment d’aimables et pieux conseils, qui caractérisent à merveille la situation des ames à cette époque, et ce mélange d’élégance littéraire, un peu païenne, avec une morale austère. La traduction de MM. Grégoire et Collombet reproduit bien le modèle, et, placée en regard du texte, elle aide souvent en même temps qu’elle invite à y recourir. Des biographies, des notes, des rapprochemens et éclaircissemens accompagnent les traités et complètent la perspective historique de ce temps-là. MM. Grégoire et Collombet nous promettent pour leur prochaine traduction saint Sidoine Apollinaire, avec le texte en regard : nous ne saurions trop encourager ces travaux de conscience et d’étude pieuse, qui font circuler dans un plus grand nombre de mains des trésors que les érudits connaissent et que toutes les personnes instruites devraient posséder.

— Le docteur Léon Simon vient de donner une traduction fort soignée du grand ouvrage de Dugald Stewart, Philosophie des Facultés actives et morales de l’Homme[2]. Le célèbre auteur écossais, dans cet écrit qui présente l’ensemble complet de ses observations et de sa doctrine philosophique morale, développe ce qu’il n’avait fait qu’indiquer sommairement pour ses élèves dans ses Esquisses de Philosophie morale, que M. Jouffroy a si éloquemment introduites et naturalisées parmi nous. Dans son premier grand ouvrage sur la Philosophie de l’Esprit humain, Dugald Stewart envisageait principalement l’homme comme être intelligent, et s’attachait à analyser surtout cette partie de notre nature qu’on appelle entendement, marchant sur les traces de Reid et redressant Locke. Mais ici, le philosophe, par une psycologie moins abstraite et moins exclusivement rationnelle, aborde l’homme du côté des penchans actifs, des pas-

  1. Rusand à Lyon ; Poussielgue-Rusand, Paris, rue Hautefeuille, 9.
  2. Alexandre Johanneau, rue du Coq-Saint-Honoré, 8, 2 vol., in-8o.