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POÉSIES POPULAIRES DE LA BASSE-BRETAGNE.

suit toujours ces désappointemens de l’ame : il secoue sur son passé la poussière de ses pieds et se mêle à la foule pour n’en plus sortir.

Un épilogue plein de portée termine le poème et donne, avec une admirable brièveté, la conclusion banale de ce drame sans dénouement, comme la plupart des existences. Il est consacré à raconter le mariage du cloarec avec une jeune pennerès, à laquelle les parens donnent, en la mariant, leur bénédiction et une partie de leur fortune. — Toute la moralité du livre est là. C’est une vie humaine dans toute sa triviale vérité, c’est l’histoire de notre voisin, de tout le monde ; un roman commencé sous les arbres, près d’une jeune fille au regarder languissant et au gracieux parler, et qui se termine avec une autre par-devant notaire !

§. vi.
La révolution en Basse-Bretagne. — Une messe sur la mer. — Procession des Rogations. — Poème breton sur la révolution française.

Outre les Aventures d’un jeune Bas-Breton, nous avons parlé, au commencement du chapitre qui précède, d’un poème sur la révolution française. Cet ouvrage, encore inédit, mais fort répandu dans le Finistère et dans les Côtes-du-Nord, fut fait par de pauvres prêtres réfugiés en Angleterre, lors des persécutions de la Terreur. La révolution y est jugée comme elle devait l’être par des catholiques et des exilés, avec plus de passion que de justice. Mais qui ne comprend qu’il en devait être ainsi ? Ce n’est pas à ceux dont les espérances et le bonheur furent ensevelis sous la lave qu’il faut demander l’éloge du volcan, mais à nous qui jouissons maintenant de ses bienfaits et qui vivons sur le terrain fécondé par la pluie de feu qui dévora nos pères. Puis, il faut bien le comprendre, la révolution ne fut pas en Bretagne ce qu’elle était ailleurs. Là, elle fut plus inattendue, plus hostile aux masses. Aussi les choses ne s’y bornèrent point, comme partout, à un émondage régulier de têtes ; il y eut chez nous un drame moins vulgaire et plus curieux à étudier. Ce fut la lutte entre la guillotine et les croyances ; lutte acharnée, dans laquelle la guillotine usa son couteau et fut