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flèche éloignée d’une église : tout ce récit est plein de ravissantes choses que nous voudrions pouvoir traduire.

Bonjour, ô bien-aimée, soulagement de mon âme, charmeresse de mes yeux, joie de mon cœur ; bonjour, ma douceur, mon espérance, ma consolation !

— Ô jeune ami, je voudrais être éloquente pour causer avec vous, mais ma langue est ignorante ; oh ! ne parlons pas tous deux, parlez seul, jeune ami !
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Je me levai d’auprès de ma maîtresse, et je me mis à marcher, et bien des portes de maison avaient passé devant moi, lorsque je vis les tours de Kernitron. — Et à cette vue je m’arrêtai tout pensif !

Dès que je fus arrivé là, mon esprit se trouva changé ; toute ma dissouciance s’était endolorie ; toute ma dissouciance s’était tournée en douleur.

— Oh ! je voudrais, mon Dieu, être descendu dans un trou de terre !

Bientôt ces remords du cloarec prennent plus de force ; ce n’est point encore la voix de Dieu qui lui parle, mais celle de la raison qui lui dit de retourner à ses études qu’il néglige pour l’amour d’une femme. Ici commencent les imitations classiques dont nous avons parlé ; l’émotion poétique et vraie disparaît pour faire place à l’amplification rhétoricienne et au bavardage mythologique. Un grand combat s’élève entre les Muses et Cupidon qui se disputent tour à tour le jeune étudiant. Thalie lui fait observer très judicieusement que s’il se livre à sa passion, il n’obtiendra point la clé du temple de Mémoire, parce que l’on n’a jamais vu Cupidon et Minerve avoir leurs deux têtes dans le même bonnet. Le cloarec est presque persuadé, il veut abandonner ses préoccupations amoureuses, et substituer les enseignemens sévères de ses livres aux causeries fascinantes de la pennerès de Leo-Drès. Mais Vénus emploie mille artifices pour lui rappeler le souvenir de sa bien-aimée.

« Un matin, en sortant, je vis une image peinte sur ma porte ; — et c’était l’image de ma plus aimée. Elle pleurait, et ces mots