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avons eu la curiosité de retrouver et de feuilleter la plupart de ces romans oubliés, espérant y saisir quelque trace du brillant écrivain d’aujourd’hui. Ce n’a pas été sans adresse que nous avons dû remonter à travers ce dédale croisé de pseudonymes, le long de ces sources assez peu limpides qui se perdaient ou changeaient de nom à chaque pas. La Bibliographie romancière en main, nous étions ballotté de M. Horace de Saint-Aubin, bachelier ès-lettres, à M. de Villerglé, de M. de Villerglé de Saint-Alme à lord R’Hoone. Enfin nous avons eu la satisfaction de dresser une filiation aussi complète qu’il nous a été possible, bien que nous y sentions encore beaucoup de lacunes : les Deux Hector, le Centenaire, 1821 ; le Vicaire des Ardennes, 1822, et durant cette même année, Charles Pointel, L’Héritière de Birague, Jean-Louis, le Tartare, ou le Retour de l’Exilé, Clotilde de Lusignan ; en 1823, la Dernière Fée, Michel et Christine, l’Anonyme ; en 1824, Annette et le Criminel ; en 1825, Wann-Chlore ; en 1827, le Corrupteur ; cela ne nous mène pas loin du Dernier des Chouans et de 1829, moment où la vie littéraire de M. de Balzac se produit au grand jour. Nous avons été peu payés, avouons-le, de notre indiscrète recherche, en parcourant ces volumes de M. de Villerglé, que le Miroir du temps rapprochait, quant au choix des sujets, des romans de Pigault et de Rétif, et que le libraire Pigoreau classait parmi les romans gais en opposition aux romans noirs, aux histoires de brigands et de fantômes. C’est tout ce qu’on en peut dire de mieux. J’ai été frappé dans la préface du Vicaire des Ardennes de ce que l’auteur annonce délibérément au public qu’ils ont long-temps à se voir et à se connaître l’un l’autre, ayant, dit-il, trente ouvrages consécutifs à faire paraître. Un trait du caractère de M. de Balzac, c’est, aussitôt qu’il écrit la première page d’un livre, d’avoir tout de suite trente autres volumes en idée devant lui et de rêver ainsi des séries indéterminées qui doivent, en se rejoignant, former une œuvre immense. Au reste, malgré les trente ouvrages promis et donnés par l’auteur du Vicaire, aucune œuvre suivie n’entrait alors dans sa pensée ; il écrivait au hasard, à foison, sans but ni souci littéraire. Wann-Chlore, il est vrai, se distingue des précédens ouvrages par un ton plus soutenu et des mœurs plus relevées ; mais qu’est-ce encore ! Les Derniers Chouans offrent seuls pour la pre-