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REVUE DES DEUX MONDES.

De toutes les branches d’industrie manufacturière en France, la plus importante, sans contredit, est celle de la soierie. C’est au goût de nos fabricans et de nos dessinateurs, à l’habileté de nos teinturiers et de nos ouvriers tisseurs, qu’est due la supériorité que nous conservons encore. Malheureusement, de graves circonstances ont, depuis quelques années, porté la perturbation dans la fabrique et placé son avenir dans une situation critique. Ce n’est point ici le lieu d’examiner la cause des malheurs que déplore encore cette noble cité de Lyon, si long-temps métropole des arts et du commerce. Une étude approfondie des vices de notre ordre social peut seule indiquer le remède et conserver au pays les avantages que la rivalité des nations étrangères nous dispute de toutes parts. Le péril est imminent et ne peut être conjuré que par un véritable retour de la part du gouvernement aux idées d’une économie politique libérale et éclairée.

La France produit une quantité considérable de soie, comme matière première. Les progrès de notre agriculture, ceux surtout de la science mécanique, doivent augmenter encore cette production qui ne sera en rien contrariée par l’adoucissement que nous avons eu le bon esprit d’apporter aux droits sur la soie étrangère, car celle-ci nous devons nous garder de la repousser pour la faire profiter à nos rivaux. L’Angleterre trouve moyen d’employer l’immense quantité de laine qu’elle produit et d’en importer encore ; pourquoi n’en ferions-nous pas de même pour la soie ?

La France a dès long-temps renoncé, pour les soieries fabriquées à l’étranger, au faux système de la prohibition. Les droits qu’elle perçoit à l’importation constituent une protection suffisante, mais ils n’empêchent pas d’être avertis du relâchement dans notre industrie et de la nécessité de redoubler d’efforts pour maintenir la concurrence. Le pays eût gagné à ce que la sagesse de cette mesure eût été générale.

Quelques chiffres pris à des époques assez distantes nous paraissent nécessaires pour que l’on puisse juger de l’importance du commerce des soieries.

En 1823, année qui a précédé l’ouverture du marché anglais, la France a importé pour 33 à 34 millions de francs de soies étrangères. Elle a acheté de plus pour 2,163,756 fr. de tissus fabriqués, dont :


1,000,000 fr. Étoffes unies, châles ou mouchoirs.
796,000 Rubannerie et passementerie.
360,000 Fleurets tissus.


et le reste sans importance.