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DE L’INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE EN FRANCE.

l’usage des machines nécessaires à une fabrication perfectionnée. Elbœuf, dont la grande draperie est le type de la solidité, a aussi envoyé à l’exposition une variété d’étoffes légères dont les couleurs et le tissu laissent peu à désirer. Les cuirs de laine et les castorines de Castres, ainsi qu’un produit nouveau appelé hybernine, élèvent encore la réputation de la fabrique déjà si recommandable de cette ville. Un petit nombre de fabricans de Lodève, de Saint-Pons et de Saint-Chinian se sont faits les représentans des fabriques de draps de troupes et de draps de couleur à bas prix. Bédarieux et Clermont de Lodève se sont abstenus de paraître à l’exposition, au grand regret de ceux qui comme nous aiment les prix modiques en harmonie avec une fabrication solide et cependant soignée. Là on a compris que l’attention se porterait sur les draps à 60 fr. l’aune, plutôt que sur ceux de 10 à 15 fr., et que des draps qui se consomment au Levant ou dans le fond de la province ne paraîtraient pas aussi dignes de faveurs que ceux que l’on porte à la cour ou dans les salons des ministres. Grâce à nos lois de douanes, nous n’avons pu trouver à l’exposition un seul échantillon de tissu en poil de Brême ; il est vrai que cela ne sert qu’aux matelots. Nous avons aussi manqué de documens sur quelques parties intéressantes de l’exposition où un petit nombre d’articles à bas prix était relégué. Nous le regrettons d’autant plus que nous n’avons jamais entrevu l’avenir du commerce français dans la fabrication des objets à prix élevé. Aussi, un journal belge terminait-il son examen de notre exposition de draps par ces mots significatifs : « La Belgique n’a pas à s’en effrayer ! »

La fabrication des casimirs a suivi les progrès de celle des draps dans les localités qui s’en occupent simultanément, et surtout à Sedan. Mais d’autres étoffes légères, et surtout celle qui est connue sous le nom de mérinos, font le plus grand honneur à nos manufactures et sont estimées des étrangers. Il y a une amélioration notable dans les flanelles de Reims et les petites étoffes mélangées ; mais nous sommes loin, pour les flanelles surtout, de pouvoir songer à aucune concurrence avec l’Angleterre.

Si nos gasquets pour le Levant ont conservé un débouché précieux, le reste de notre bonneterie ne peut, ni pour le prix, ni pour la qualité, soutenir la concurrence étrangère. Aussi les États-Unis n’en ont-ils reçu que pour 16,000 dollars (84,000 fr.), en 1831-32, quand l’importation anglaise s’y est élevée à 220,000 dollars (1,155,000 fr.)

La France est certainement le pays où il est le plus difficile de trouver une paire de bas de laine d’une finesse médiocre à un prix modéré. Nous ne voulons pas d’autres preuves des progrès immenses qui restent à faire à nos filatures, tout en appréciant les difficultés qui gênent leur essor.