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mens de fabrication ou des élémens de concurrence. D’autres comptent s’aider de la publicité que reçoit de la presse périodique l’examen de l’exposition. D’autres enfin, et c’est le plus grand nombre, ne voient dans l’exposition qu’un mode de remplacer les foires du moyen-âge, et d’opérer plus promptement la circulation et le débit d’une marchandise.

Les foires étaient utiles et nécessaires alors que la féodalité et la division de l’Europe en petits états rendaient les routes peu sûres, et obligeaient, comme cela se pratique encore en Asie, les acheteurs à se réunir en caravanes pour leur protection mutuelle. Ces temps sont loin de nous, et cependant Beaucaire, Francfort-sur-le-Mein, Leipsig, etc., attirent encore les commerçans éloignés, comme les consommateurs du voisinage ; ce sont des bourses annuelles pour les uns, des lieux d’approvisionnement pour les autres. L’exposition de Paris a pris, dans quelques-unes de ses parties, un peu de ce caractère, et une portion considérable des exposans a plutôt compté sur le débit immédiat que lui procurerait ce bazar ouvert pendant deux mois, que songé au jugement que l’on pouvait porter de ses produits. Certes, nous sommes loin de blâmer les hommes qui recherchent les avantages qui doivent, dans ces occasions, compenser pour eux quelques-unes des chances de la carrière industrielle ; mais on peut se demander si c’est bien là le but que le gouvernement devrait se proposer, et quelle est alors la part du pays dans ces éclatantes réunions ?

Il n’entre pas dans notre plan de retracer les progrès que les fabricans et les producteurs français ont pu faire dans les vingt années qui se sont écoulées de 1806 à 1827. Ces progrès étaient grands ; mais ont-ils été en proportion de la longue période que cet espace de temps comprend ? Nous n’hésitons pas à dire que non. Ce n’est pas avancer que de ne pas resserrer la distance où l’on est de ses concurrens. La marche de l’industrie a été embarrassée, hésitante. S’appuyant principalement sur la consommation intérieure, elle a été, d’un autre côté, peu secondée par le commerce extérieur, dont la situation est toujours si difficile. La science de la création, c’est la science des débouchés ; et comment s’étonner de la lenteur du développement de notre production quand les vérités économiques les plus triviales sont mises en doute ou combattues par les ministres les plus influens de l’état, qui croient seuls avoir découvert la vraie science économique ?

Les doctrines prohibitives sont commodes pour les gouvernans ; elles leur concilient l’affection d’une classe entière de producteurs qui se trouvent délivrés du souci de la concurrence étrangère. Le dommage souffert par chaque consommateur en particulier ne paraît pas à celui-ci assez