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REVUE DES DEUX MONDES.

LE BARON.

Cela est impossible.

MAÎTRE BRIDAINE.

J’en suis sûr comme de ma vie ; il m’a parlé de fort près tout-à-l’heure ; il sentait le vin à faire peur.

LE BARON.

Brisons là ; je vous répète que cela est impossible.

(Entre dame Pluche.)

Vous voilà, bonne dame Pluche ? Ma nièce est sans doute avec vous ?

DAME PLUCHE.

Elle me suit, monseigneur, je l’ai devancée de quelques pas.

LE BARON.

Maître Bridaine, vous êtes mon ami. Je vous présente la dame Pluche, gouvernante de ma nièce. Ma nièce est depuis hier, à sept heures de nuit, parvenue à l’âge de dix-huit ans. Elle sort du meilleur couvent de France ; dame Pluche, je vous présente maître Bridaine, curé de la paroisse ; c’est mon ami.

DAME PLUCHE, saluant.

Du meilleur couvent de France, seigneur, et je puis ajouter : la meilleure chrétienne du couvent.

LE BARON.

Allez, dame Pluche, réparer le désordre où vous voilà ; ma nièce va bientôt venir, j’espère ; soyez prête à l’heure du dîner.

(Dame Pluche sort.)
MAÎTRE BRIDAINE.

Cette vieille demoiselle paraît tout-à-fait pleine d’onction.

LE BARON.

Pleine d’onction et de componction, maître Bridaine ; sa vertu est inattaquable.

MAÎTRE BRIDAINE.

Mais le gouverneur sent le vin ; j’en ai la certitude.

LE BARON.

Maître Bridaine ! il y a des momens où je doute de votre amitié. Prenez-vous à tâche de me contredire ? Pas un mot de plus là-dessus. J’ai formé le dessein de marier mon fils avec ma nièce ; c’est un couple assorti ; leur éducation me coûte six mille écus.

MAÎTRE BRIDAINE.

Il sera nécessaire d’obtenir des dispenses.