Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 3.djvu/339

Cette page a été validée par deux contributeurs.
335
NAPOLÉON.

— Pourquoi tous êtes-vous si pâles ?
Avez-vous peur, mes vieux soldats,
Des biscayens ou bien des balles ?
Avez-vous soif ? êtes-vous las ?

— Oui, soif de ce vin de l’épée
Dont la terre est encor trempée ;
Si nos pieds étaient trop usés,
La mort nous a bien reposés.

— Avez-vous assez fait la guerre,
Mes lieutenans, êtes-vous las ?
Sur vos pieds blanchit la poussière !
Pourquoi ne l’essuyez-vous pas ?

— Sire, soufflez sur nos fantômes.
Ou fantassins, ou cavaliers,
Cette poussière à nos souliers,
C’est la poussière des royaumes.

— Êtes-vous las, mes généraux,
Mes officiers, mes maréchaux ?
Jurez-moi là, si je succombe,
Fidélité jusqu’à la tombe.

— Le bras levé nous le jurons,
Et le serment nous le tiendrons,
Devant le ciel, devant Dieu, sire,
De bien défendre votre empire. —

Depuis le soir jusqu’à minuit,
Des morts a duré la revue ;
Et l’étoile à l’étoile a dit :
De votre ciel l’avez-vous vue ?


vi.



Un jour il dit : — Grand-maréchal,
Allez seller votre cheval.