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DE L’ABSOLUTISME ET DE LA LIBERTÉ.

ciété, et vous n’avez recours à aucuns moyens sévères et efficaces ! Secouez cette mortelle léthargie, songez que les libéraux ne raillent point, qu’ils entendent bien vous rayer entièrement de l’almanach, et souvenez-vous qu’à votre cause est liée celle des peuples, qui, selon les décrets de la Providence, doivent être guidés, défendus et sauvés par les rois. Consultez la vérité, suivez les impulsions de votre cœur, et ne vous laissez point séduire par les grimaces perfides de cette prostituée de Politique. Enfin lisez les leçons de l’histoire, et pour ramener dans la droite voie une génération égarée, employez les remèdes que vous enseigne l’Expérience. »

Polichinelle. — Jusqu’ici il n’y a rien à dire, et les rois ne sauraient se fâcher.

L’Expérience. — Comment a-t-il pu jamais vous passer par l’esprit que je voulusse offenser les rois ? Je leur parle avec confiance, parce que je suis leur maîtresse, et parce qu’ils agréent, eux aussi, lorsqu’on le leur adresse en secret, un langage cordial et sincère. Du reste, l’Expérience enseigne à respecter ceux que Dieu a placés à la tête des nations, parce que là où finit le respect pour le roi commence la ruine du peuple. Continuez de lire la lettre.

Le Docteur. — « Quand on voit de mauvaises actions, la première chose est d’élever la voix et de crier contre les malfaiteurs. Élevez donc la voix du haut de vos trônes, avertissez, reprenez, menacez, et ne vous contentez point de quelque misérable petit édit donné de temps en temps et tout emmiellé de paroles doucereuses ; mais parlez en roi qui a le droit de commander et de se faire obéir. En outre encouragez les bons, et faites qu’eux aussi parlent et élèvent la voix contre les méchans. Le monde est rempli de petits livres, de journaux, de feuilles qui répandent la contagion : faites qu’on le remplisse d’écrits salutaires qui soient un antidote contre la corruption des esprits. Employez les armes de vos ennemis ; si les rebelles font rire aux dépens de la fidélité, que les bons fassent rire aux dépens de la révolution. Si le poison se vend à bas prix par la propagande, que la souveraineté fournisse gratuitement le contre-poison. Aujourd’hui, le genre humain veut lire, et une feuille de papier écrite judicieusement a plus de force qu’un bataillon de grenadiers. Les hommes d’esprit