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DES LÉGISLATIONS COMPARÉES.

L’Attique, baignée de deux côtés par la mer et liée au Péloponèse par l’isthme de Corinthe, offrait à l’activité humaine un théâtre à la fois ouvert et resserré qui, pas trop distant de l’Asie, échappait à l’esprit fanatique des sociétés grecques du nord. Trois époques marquent son antique histoire, l’époque pélasgique, l’époque cécropienne, et l’époque ionienne. L’époque pélasgique fut occupée par des déluges et des migrations que nous ne pouvons que soupçonner. La tradition raconte que Cécrops vint de Saïs apportant aux Athéniens les principes de la sociabilité, le respect des dieux, le respect des morts, la monogamie et la justice. Il enseigna Jupiter, c’était l’unité ; Neptune, c’était la mer ; Minerve, c’était la pensée. Érechthée, qui vint après Cécrops, fut, suivant une tradition, l’inventeur de l’agriculture. Ainsi les hommes avaient à la même époque du pain et des lois : époque où l’Attique se débrouillait elle-même avec le secours de quelques inspirations égyptiennes, où sa vie indigène recevait une impulsion exotique ; voilà pourquoi Cécrops passait pour avoir une double nature διφυὴς (diphuês) ; c’étaient l’Égypte et la Grèce, l’Orient et l’Europe commençant cette union que nous poursuivons aujourd’hui. Thésée est le titulaire de l’époque ionienne, temps d’émancipation et de liberté, où l’Attique commence à se distinguer hostilement du Péloponèse. À l’époque de Cécrops les habitans de l’Attique étaient partagés en prêtres, nobles, artisans et laboureurs ; à l’époque de Thésée, les prêtres ont disparu : c’est le temps pour les Athéniens de l’unité politique et nationale[1].

Dès lors, les institutions cherchent à s’approprier au développement de la société même ; après Dracon, qui ne trouva pas de génie dans la cruauté, vint un homme aimable et intelligent, faisant fort bien les lois et les vers, esprit heureux et étendu, d’une modération naturelle et d’une grandeur facile. Solon détruisit l’empire de l’aristocratie de race, et sans fonder une démocratie pure, il établit une sorte de régime tempéré que Clisthène fit pencher du côté du peuple.

Après Solon et Clisthène, la démocratie athénienne constituée a trois représentans : Thémistocle, Périclès et Alcibiade. Thémis-

  1. Voyez Thucydide, livre Ier.