comme elle a bien choisi les fleurs de ta couronne ! Anna ! Anna ! comme te voilà belle ! laisse-moi t’embrasser. Oh ! je t’aime plus que jamais ; folle, que parlais-tu de ciel ? nous y sommes dans le ciel ! Dis, n’es-tu pas la vierge Anna ? ne suis-je pas ton époux ? n’est-ce pas Dieu, cet ange invisible, qui nous unit ensemble après la mort, et nous apporte avec ses ailes tous les parfums de la vie ? Anna ! Anna ! quelle trinité veux-tu donc plus auguste que la nôtre ? Des prières ? oui, j’en ferai, mais pour t’adorer, car toi seule es ma vierge ; l’autre, je ne la connais que pour l’avoir vue peinte sur des murailles. Mais toi, je t’ai suivie autrefois, j’ai touché les pans de ta robe, et je te retrouve sanctifiée aujourd’hui. Anna ! Anna ! un baiser encore, toujours ! pourquoi te retirer ainsi ? Méchante, avez-vous donc oublié cette parole : Don Juan, ton amour en ce monde, et l’enfer dans l’autre ? As-tu donc oublié cette parole, toi qui veux t’envoler au ciel lorsque je suis damné, et mettre ainsi le purgatoire entre nous deux afin de ne plus entendre ma voix ?
Ah ! don Juan, c’est indigne ; je viens te demander mon salut et tu travailles encore à ma perdition ! Mais sois averti, quoi que tu fasses maintenant, je ne tomberai pas plus bas que le purgatoire.
Tu ne te souviens donc plus d’avoir répété trois fois cette parole ?
Lorsque je blasphémais de la sorte, je confondais la passion des sens avec le pur amour, je n’étais pas entrée au ciel, je n’avais pas vu le bonheur des anges.
Ils sont donc bien heureux les anges !
Seigneur, Seigneur, pourquoi m’avoir montré ta comédie, puisque je ne dois point y prendre part de dix mille ans ? Hélas, hélas ! pourquoi t’être égarée au jardin du ciel, mon ame ! pauvre fleur qui dois prendre racine au purgatoire ? Oh ! les anges, source éternelle d’extase et de béatitude ! couronnes où l’amour resplendit,