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la Vierge de Lorette, trois autres à l’église de Maria-Plain, deux à l’autel de St.-François-de-Paule, et deux à la paroisse de notre grand St.-Jean-Népomucène. » Les lettres du vieux musicien se terminent toujours par de semblables recommandations, et ce n’est qu’après avoir écrit à Saltzbourg pour s’assurer la protection du patron de la Bohême et de la vierge Marie, qu’il se risqua à passer la mer pour se rendre en Hollande.

Sans l’avarice et l’amour effréné du gain qui éclatent à chaque ligne de sa correspondance, on éprouverait un vif intérêt pour ce père de famille qui entreprenait avec tant de courage ces longs voyages d’artiste avec sa femme et ses deux enfans, et qui se présentait avec tant de confiance devant les rois de l’Europe, après avoir dévotement invoqué l’appui de Dieu. Sans cette funeste souillure, ne serait-ce pas un touchant spectacle que la vue de cette petite famille, apportant sa simplicité, sa candeur, son ignorance, dans les riches salons de Vienne, au milieu du luxe et de la corruption de Versailles, à la cour d’Angleterre, ne s’occupant uniquement que de l’art, n’ayant de relations et de liens avec tout ce qui les entoure dans ces brillantes villes, que par cet art sublime qui leur ouvrait les portes des palais et leur frayait le chemin jusqu’à la table des rois. Le jeune Mozart vécut ainsi. L’exemple et les leçons de son père ne lui apprirent point à descendre des hauteurs du génie pour supputer les bénéfices que le génie peut faire en se détaillant avec sagacité. En le suivant pas à pas, on verra que son talent est resté pur de toute tache de ce genre, et qu’une fois sorti des langes où le retenait l’avarice paternelle, l’aiglon prit son vol au plus haut des cieux pour n’en descendre jamais.


ii.

Voici Mozart en Italie ! Les sonnets pleuvent sur sa tête. À Milan, la Corilla chante le mérite du signor Amedeo Mozart, qui n’est autre que le petit Wolfgang. À Rome, le pape le nomme chevalier de l’Éperon-d’Or, eques auratœ militiœ. À Naples, il excite des cris d’enthousiasme en se faisant entendre dans le Conservatorio