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REVUE DES DEUX MONDES.

FANTASIO.

La dimension d’un palais ou d’une chambre ne fait pas l’homme plus ou moins libre. Le corps se remue où il peut ; l’imagination ouvre quelquefois des ailes grandes comme le ciel dans un cachot grand comme la main.

ELSBETH.

Ainsi donc tu es un heureux fou ?

FANTASIO.

Très heureux. Je fais la conversation avec les petits chiens et les marmitons. Il y a un roquet pas plus haut que cela dans la cuisine, qui m’a dit des choses charmantes.

ELSBETH.

En quel langage ?

FANTASIO.

Dans le style le plus pur. Il ne ferait pas une seule faute de grammaire dans l’espace d’une année.

ELSBETH.

Pourrai-je entendre quelques mots de ce style ?

FANTASIO.

En vérité, je ne le voudrais pas ; c’est une langue qui est particulière. Il n’y a pas que les roquets qui la parlent, les arbres et les grains de blé eux-mêmes la savent aussi ; mais les filles de roi ne la savent pas. À quand votre noce ?

ELSBETH.

Dans quelques jours tout sera fini.

FANTASIO.

C’est-à-dire, tout sera commencé. Je compte vous offrir un présent de ma main.

ELSBETH.

Quel présent ? Je suis curieuse de cela.

FANTASIO.

Je compte vous offrir un joli petit serin empaillé, qui chante comme un rossignol.

ELSBETH.

Comment peut-il chanter, s’il est empaillé ?

FANTASIO.

Il chante parfaitement.