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ANCIENNE LITTÉRATURE ITALIENNE.

les marchés dans le but de faire des prosélytes à leur école ; et que quand lui, Ivon, avait quitté Cosme pour passer par Milan, Crémone, Venise, jusqu’à Vienne, il avait été toujours et partout reconnu et accueilli au moyen de signes. »

M. Rossetti part de ce fait pour revenir sur le style et le langage figurés, employés précédemment dans les Églogues de Virgile, dans l’Apocalypse, et dans plusieurs autres ouvrages, où ce moyen de dire la vérité d’une manière détournée fut conservé ; puis il arrive à citer les églogues latines de Pétrarque, où ce langage apocalyptique est non-seulement reproduit, mais où il a évidemment pour objet de peindre les abus, les désordres, l’avarice et les injustices des papes et de leur cour, qui se tenait alors à Avignon. Pour ne fournir qu’une preuve à l’appui du système de M. Rossetti, on rapportera quatre vers de la vie églogue de Pétrarque, dans lesquels Ginguené lui-même a reconnu qu’ils sont mis dans la bouche de Clément vi, sous le nom de Mition, et adressés à saint Pierre sous le nom de Pamphile qui, dans la même églogue, fait des reproches au pontife sur l’état de langueur et de désordre où se trouve son troupeau. Clément vi ou Mition répond :


Furibus est mecum contractum, sanguine porci,
Fœdus et inferni descriptum regis in ara ;
Invisum superis, sacrum fortasse profundis,
Acceptum sed jure Diis, quibus ære litatum est.


« Il y a un pacte contracté entre moi et les voleurs, pacte signé avec du sang de porc sur l’autel du dieu de l’enfer ; pacte odieux aux divinités célestes, peut-être sacré pour les inférieures, mais reconnu de droit par les dieux auxquels il est offert en monnaie. »


L’auteur, en démontrant que depuis l’Apocalypse jusqu’aux écrits de Pétrarque, Rome, les papes et leur cour n’ont pas cessé d’être l’objet de reproches, de critiques et d’invectives exprimées dans des compositions et sous des paroles figurées, trace en quelque sorte une ligne de circonvallation, au centre de laquelle il enferme son sujet principal pour l’examiner tout à l’aise et le disséquer en quelque sorte, de manière à rendre sa démonstration plus évidente. Or, ce sujet est Dante Alighieri et ses écrits.