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badours, écrites et mises en ordre par Rémond Vidal de Bésalu, homme assez entendu dans les arts libéraux et grand troubadour[1]. Je connais aussi, dit Santillane, les lois du consistoire de la gaie science, qui se tint long-temps au collége de Toulouse, avec la permission et sous la protection du roi de France. » Vidal de Bésalu fut le fondateur de ce consistoire, le marquis de Villena en fait foi dans sa Gaie Science, et son autorité semble ici irrécusable. L’ouvrage de Vidal de Bésalu, cité par Santillane, était une sorte de poétique, écrite en limousin ou provençal, dont le manuscrit existerait encore.

Les cent strophes qui forment le Centiloque des proverbes de Santillane sont chacune de huit vers. C’est une suite d’aphorismes moraux confirmés par des exemples historiques, un compendium de morale socratique et chrétienne. L’expression en est de la plus naïve simplicité, et revêt constamment la forme sentencieuse. Santillane était au moins aussi philosophe que poète, et ses proverbes sont un monument de la direction morale et philosophique qu’il voulait imprimer à la poésie. Ce sont d’excellens préceptes d’un père à son fils, car l’auteur y parle au prince Henri au nom du roi son père ; mais le style en est rude et sec, et quelquefois aussi un peu obscur. Voici une strophe qui servira de paradigme pour faire juger des autres, sous le rapport métrique au moins :

El comienço de salud
Es el saber
Distinguir y conocer
Qual es virtud,
Quien comiença en junentud
A bien obrar
Señal es de no errar
En senetud.

« Le commencement du salut est de savoir distinguer et connaître la vertu : qui commence dans la jeunesse à bien agir montre qu’il n’errera pas dans la vieillesse. »

Santillane a éclairci lui-même le sens de quelques-uns de ses

  1. Las reglas del trobar escritas y ordenadas por Remon Vidal de Besalu hombre asaz entendido en las artes liberales, y gran trobador.