Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 4.djvu/66

Cette page a été validée par deux contributeurs.
62
REVUE DES DEUX MONDES.

riale ou de valériane. On trouvera à ce sujet des renseignemens curieux dans un Mémoire de M. Dureau de Lamalle sur le renouvellement périodique des forêts. L’auteur y a indiqué, en se fondant sur des documens authentiques, l’ordre suivant lequel les espèces forestières se succèdent jusqu’à ce que, la rotation accomplie, la forêt se retrouve composée comme elle l’avait été à une époque précédente. Ces changemens ont lieu surtout après les coupes, qui, faisant, pour ainsi dire, table rase, permettent aux espèces pour lesquelles le sol est devenu plus convenable d’y prendre à leur tour la prédominance.

Dans les parties chaudes du Nouveau-Monde, la coupe des forêts est également suivie d’un changement spontané dans la végétation, mais avec cette grande différence, que tandis que chez nous les choses tendent, après un certain nombre de mutations et dans un espace de temps dont on peut, à quelque cinquante ans près, fixer la durée, à revenir à l’état primitif, dans l’Amérique tropicale il n’y a rien de semblable à ce retour ; du moins si la périodicité existe, elle est insensible pour nous, et le cercle dans lequel elle doit s’accomplir se dérobe à nos regards par son immensité. Ce qui nous apparaît, c’est le changement, à travers un petit nombre de courtes transitions, d’un état dont on n’aperçoit point le commencement, à un autre état dont rien ne fait prévoir la fin.

M. Auguste de Saint-Hilaire, dans la relation de son voyage au Brésil[1], a appelé l’attention sur la facilité avec laquelle s’opèrent ces métamorphoses qui changent en peu d’années la face de provinces entières, et sur l’imprévoyance des colons qui, sans recueillir eux-mêmes de la destruction des forêts un bien grand avantage, ruinent les ressources du pays et condamnent ainsi leurs enfans à une misère presque certaine.

« Tout le système de l’agriculture brésilienne, dit ce savant voyageur, est fondé sur la destruction des forêts, et où il n’y a point de bois, il n’y a point de culture. L’expérience a appris aux Brésiliens quelles espèces d’arbres sont communes dans les forêts qui, mises en

  1. La Revue des Deux Mondes a rendu compte de ce livre à l’époque de sa publication. Un nouvel ouvrage du même auteur, le Voyage dans le district des Diamans, sera analysé dans un de nos prochains numéros.