Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 4.djvu/657

Cette page a été validée par deux contributeurs.
653
NOUVELLES LETTRES SUR L’HISTOIRE DE FRANCE.

d’Angers, d’où il était sorti naguère à la tête d’une armée nombreuse[1].

Cette fin ridicule d’une expédition entreprise avec insolence produisit dans l’ame du roi Hilperik un sentiment de dépit sombre et furieux. Ce n’était plus seulement la passion du gain, mais encore celle de l’orgueil blessé, qui l’excitait à tout risquer pour reprendre ses conquêtes, et répondre au défi qu’on semblait lui porter. Décidé à venger son honneur d’une manière éclatante, il rassembla sur les bords de la Loire une armée beaucoup plus nombreuse que la première, et il en donna le commandement à Theodebert, l’aîné de ses fils[2]. Le prudent Gonthramn réfléchit cette fois qu’une nouvelle intervention de sa part serait probablement inutile pour la paix, et certainement très coûteuse pour lui. Renonçant au rôle d’arbitre, il adopta un genre de médiation qui, en cas de non-succès, lui permettait de se tenir à l’écart et de ne prendre aucun parti dans la querelle. Il remit à un synode ecclésiastique le soin de réconcilier les deux rois ; et, d’après ses ordres, tous les évêques de son royaume, neutres par position, s’assemblèrent en concile dans une ville neutre, Paris, où, suivant l’acte de partage, aucun des fils de Chlother ne pouvait mettre le pied sans le consentement des deux autres[3]. Le concile adressa au roi de Neustrie les exhortations les plus pressantes pour qu’il gardât la paix jurée et n’envahit plus les droits de son frère. Mais tous les discours et tous les messages furent inutiles. Hilperik n’écoutant rien, continua ses préparatifs militaires, et les membres du synode retournèrent auprès du roi Gonthramn, apportant pour unique fruit de leur mission l’annonce d’une guerre inévitable[4].

  1. Qui vix ad patrem regrediendi liberum habuit aditum. Tamen per Andegavis regressus ad eum rediit. Greg. Turon., lib. IV, pag. 228.
  2. Chilpericus autem rex, in ira commotus, per Theodobertum filium suum seniorem, civitates ejus, Sigiberti, pervadit, id est Turonis et Pictavis, et reliquas citra Ligerim sitas. Greg. Turon., lib. IV, pag. 228.
  3. Guntchramnus rex omnes episcopos regni sui congregat, ut inter utrosque quid veritas haberet, edicerent. Greg. Turon., lib. IV, pag. 228.
  4. Sed ut bellum civile in majore pernicitate cresceret, eos audire peccatis facientibus distulerunt. Greg. Turon., lib. IV, pag. 228.