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la soutienne, ce qui fait qu’elle se montre souvent par pieds isolés, tandis que les espèces qui n’ont pas besoin d’un appui étranger, vivent presque toujours en famille. Les détails dans lesquels entre notre auteur, montrent que ce grand chusque lui était parfaitement connu, et ne permettent pas de supposer qu’il lui ait attribué par erreur les propriétés du bambou guadua.

Il n’y a pas lieu, au reste, d’être surpris que cette propriété de contenir de l’eau dans son intérieur appartienne à deux différentes espèces de bambousiers américains, puisque parmi les espèces asiatiques plusieurs la présentent également, ainsi que nous l’apprenons de Rumphius.

Cet auteur nous dit, en parlant du bambou Ily, grande espèce qui croît au Malabar : «  C’est à tort qu’on a cru que ce bambou fournissait le tabaxir, c’est-à-dire le sucre des Arabes ; l’espèce de chaux qu’on trouve dans son intérieur, quoique provenant de l’exsiccation d’une eau claire et limpide qui remplissait les tiges pendant leur jeunesse, n’a aucune saveur sucrée. »

Dans un autre endroit où il décrit le bambou Terin, qui est originaire de Java, mais que l’on a transporté et que l’on cultive à Amboine, et dans beaucoup d’autres pays, il remarque que, « quoique les tiges du terin soient, à Java et à Amboine, charnues à l’intérieur, de manière à ce qu’on les mange marinées, celles qui croissent sur les hautes montagnes de Banda, où l’air est plus froid, à Bisnagar, à Batecala, et autres lieux de l’Inde ancienne, sont moins grandes, et ne se mangent pas, parce qu’elles sont toujours pleines d’une eau claire, douce et potable, qui, en se desséchant, forme cette substance blanchâtre, sèche au toucher, et semblable à de l’amidon ou à du sucre blanc râpé que les Arabes nomment tabaxir, et les Indiens saccar membu. »

Une variété du terin fort remarquable par sa taille est celle qu’on nomme Sammat. Au Malabar, où sa tige acquiert jusqu’à un pied et demi de diamètre, les habitans en coupent des tronçons longs de douze à dix-huit pieds pour en faire des canots qui portent deux hommes. Ils ne laissent que les deux cloisons des extrémités pour former les bouts du canot ; et ils ajoutent à celle du devant une sorte d’éperon destiné à fendre l’eau. Ces embarcations chavireraient aisément, si l’on n’avait soin d’attacher aux deux