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HOFFAMNN ET DEVRIENT.

Nous devons à M. Loève-Veimars, d’avoir rendu Hoffmann[1] aussi populaire en France, qu’il l’est dans son propre pays. L’entreprise n’était pourtant pas facile, et plus d’un homme de mérite y eût échoué. De tous les romanciers allemands, l’auteur de Mademoiselle Scudéry, des Frères Sérapion, etc., est peut-être le plus intraduisible. Il faut l’avoir étudié dans l’original pour savoir tout ce qu’il y a de richesse, de variété, et de caprices dans son style ; tantôt il vous arrête par une concision désespérante, tantôt par une suite d’épithètes qui ne se distinguent l’une de l’autre que par une nuance à peine perceptible en allemand, et presque inabordable en français ; tantôt, il vous entraîne par un luxe de descriptions, par une abondance d’images, dont le pinceau le mieux exercé a grande peine à rendre tout l’effet. Que si vous avez une fois pris la résolution de le traduire, attachez-vous à lui corps à corps, ne le lâchez pas d’une ligne, ne le perdez pas une minute de vue ; car c’est le Protée nouveau qui revêt toutes les formes, qui emprunte toutes les couleurs, qui tour à tour gronde, sourit, gazouille. Ayez soin de le bien tenir, ou le voilà qui fait un bond de côté et vous échappe, qui vous lance un sarcasme, et se moque ainsi de votre

  1. La dernière livraison vient de paraître. — 4 vol. in-12, chez Eugène Renduel.