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LITTÉRATURE ANGLAISE.

d’après cela, très propre à devenir missionnaire, le placèrent d’abord chez un marchand, puis chez un autre, jusqu’à ce que, las enfin de ce genre d’occupations, ou fatigué de son état de dépendance, et se sentant doué d’une résolution assez forte, Montgomery voulut se gouverner lui-même. En 1792, il s’associa avec l’éditeur du Registre de Sheffield, journal qui défendait violemment la cause des libertés publiques. Un ecclésiastique écrivit un chant de triomphe sur le renversement de la Bastille. Montgomery l’imprima, et fut condamné à vingt livres sterling d’amende et trois mois de prison. À peine remis en liberté, il publia l’histoire d’une émeute survenue à Sheffield, et dans laquelle deux hommes avaient été tués. Là-dessus, on le traîna devant les tribunaux qui le condamnèrent à une nouvelle amende de trente livres sterling et à six mois de prison. Cependant le magistrat qui l’avait fait poursuivre s’adoucit en sa faveur, et prit à tâche de lui rendre ses souffrances plus faciles à supporter.

Mais Montgomery s’inquiétait si peu des rigueurs de la justice, qu’il fit paraître en 1797, sous le titre des Amusemens de ma prison, une collection de poésies, les unes gracieuses et légères, les autres graves et mélancoliques. Son séjour à Scarborough lui donna le temps d’écrire son poème de l’Océan, publié en 1805 ; en 1806, les évènemens politiques l’engagèrent à peindre la misère où la Suisse était plongée par ses relations avec la France. Le poème porte un caractère dramatique, et l’on y trouve de l’enthousiasme et de la sensibilité, bien que le rhythme dans lequel il est écrit soit de tous le moins propre à exprimer les sentimens tendres ou les vives émotions.

Vint ensuite le poème plus étendu des Indes occidentales, dont le succès fut tel qu’il s’en vendit plus de dix mille exemplaires. En 1812, il écrivit le Monde avant le déluge (the World before the flood) ; et, quoique ce soit là un monde assez éloigné de nous, le public lui fit cependant un très bon accueil. On ne dédaigna pas non plus de recevoir le Groënland, fragment de poème, où il dépeint l’effet des misions moraves dans ces pays glacés. Le dernier de ses ouvrages d’une grande étendue est l’Île des Pélicans (Pelican Island), poème en neuf chants dont il puisa l’idée dans les voyages du capitaine Flinders à la Nouvelle-Hollande. Une de ses œuvres les plus populaires est intitulée Chants de Sion ; c’est la traduction des psaumes de David. Les vers en sont généralement faciles, harmonieux, mais n’approchent pas encore de la vérité et de la simplicité de nos anciennes traductions.

Le mérite de Montgomery doit être apprécié, non pas d’après le langage de la Revue d’Édimbourg, mais d’après l’opinion manifestée par le public. Ses idées sont simples et élevées, son style coulant et mélodieux,