Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 4.djvu/256

Cette page a été validée par deux contributeurs.
252
REVUE DES DEUX MONDES.

d’en trouver une à la Chine ; il y en a plusieurs : la plus considérable est celle qui a été publiée au Japon, et dont M. Rémusat a donné une table analytique complète en traduisant les titres de tous les chapitres.

Il ne faut pas être trop surpris en trouvant une ressemblance de plus entre notre Europe et cette Chine qui semble avoir pris à tâche d’en offrir en tous points une reproduction, ou plutôt une contre-façon achevée. Les ouvrages encyclopédiques appartiennent à deux périodes de la vie des peuples, aux époques primitives et aux époques très avancées. Quand on sait peu, on éprouve le besoin de tout embrasser ; quand on sait beaucoup, on sent la nécessité de tout résumer. Les premiers livres des peuples contiennent la masse entière de leurs connaissances, sous une enveloppe poétique ou religieuse, dans une vaste et confuse unité. Toujours on commence par une vue de l’ensemble, puis on va de l’universel au particulier ; puis enfin, après avoir étudié en détail chaque partie du tout, on reconstruit ce tout qu’on avait décomposé, et ainsi, on finit comme on avait commencé, par des encyclopédies.

Là où la société est à la fois jeune et vieille, peu avancée et très arrêtée, ignorante de beaucoup de choses, érudite en quelques-unes, il y a double motif pour que les encyclopédies se produisent. C’est ce qui a eu lieu au moyen-âge. Le moyen-âge est un enfant né vieux ; la caducité de la société ancienne est empreinte sur la naïveté de la société nouvelle ; son berceau est un sépulcre. Aussi le moyen-âge est savant dans les langes, et encore au sein de sa nourrice morte, il balbutie confusément les choses passées. De cette science précoce et incomplète naquirent ces vastes recueils véritablement encyclopédiques, au moins dans l’intention de leurs auteurs, nommés trésors, images du monde, qui contenaient, sous une forme tantôt allégorique, tantôt purement didactique, la somme des connaissances de nos pères. Comme on croyait, dans Aristote, la Bible et quelques anciens, posséder tout savoir, on ne reculait pas devant un ouvrage complet, de omni scibili, et comme, en fait, le savoir était très limité, il était assez facile de l’y faire tenir tout entier. Il en est un peu de même à la Chine. La science y est renfermée dans des bornes étroites, mais elle a des prétentions à une géné-