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remplies, il n’y avait eu de places que pour la servidumbre royale, pour les dépendans de la cour et du palais, pour quelques étrangers. — Entourés seulement d’une douzaine de hallebardiers, les bancs des membres des cortès étaient restés isolés au milieu du corps de l’église, où personne n’avait été admis. Enfin, à ce spectacle qui aurait dû figurer au moins une représentation nationale et populaire, c’était surtout le peuple qui avait manqué. — Cela voulait trop dire qu’on ne l’y avait compté pour rien.

Et puis, il eût été à souhaiter que les rôles principaux du cérémonial fussent joués avec plus de dignité extérieure.

Tout le monde ne savait pas que le duc de Frias, — le seizième comte d’Oropesa, qui tenait l’estoc royal, avait l’ame plus haute et plus forte que le corps ; — la grande épée de Gonzalve de Cordoue avait paru bien lourde pour cette faible main.

Le duc de Medina-Celi, qui recevait l’hommage-lige, plus médiocre de taille encore, plus chétif, et presque contrefait, apparaissait là aussi assez malheureusement comme le premier représentant de la grandesse.

D’ailleurs les costumes modernes et sans caractère de la plupart des personnages contrastaient étrangement avec l’ancienneté de la pièce qu’ils représentaient. Ils rappelaient un peu les tragédies grecques jouées sous Louis xv par les comédiens français, les cheveux poudrés et en habits de marquis.

Quelques scènes petites et insignifiantes en apparence, mais dont le sens n’avait échappé à personne, avaient inspiré de tristes et pénibles réflexions.

Au moment où l’infant don Francisco de Paula, qui avait prêté serment le premier, retourna s’asseoir, telle était son émotion, que si le maître des cérémonies ne l’eût conduit et soutenu, il eût eu de la peine à arriver jusqu’à son fauteuil. — Chacun avait alors compris tout ce qu’il éprouvait, car il venait de donner au roi, son frère, une preuve bien grande d’abnégation et de dévouement. Tandis que don Carlos absent, protestant hautement contre cette jura qui prétendait consacrer l’abolition de la loi salique, lui, don Francisco, — l’infant le plus proche du trône après ce prince, — il y avait renoncé pour lui et pour ses fils. — Il avait prosterné ses chances de royauté aux pieds d’une princesse des Asturies de trois