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MÉTELLA.

bles pour atteindre à une sonnette, ce qui acheva de le mettre de très mauvaise humeur.

Le jeune Olivier n’avait pas assez de fatuité pour s’imaginer qu’il pouvait consoler Métella de l’abandon de son amant. Quoiqu’elle ne lui eût fait aucune confidence, il avait pénétré facilement son chagrin, et il en voyait la cause. Il la plaignait sincèrement et l’en aimait davantage. Cette compassion, jointe à une sorte de ressentiment des persiflages du comte, lui inspirait l’envie de le contrarier. Il vit avec joie que le dépit avait pris la place de cette singulière affectation de courtoisie, et il reprit la conversation sur un ton de sentimentalité romanesque que le comte était peu disposé à goûter, et qui augmenta singulièrement sa mauvaise humeur. Métella, surprise de voir son amant capable encore d’un sentiment de jalousie, s’en réjouit, et, femme qu’elle était, se plut à l’augmenter en accordant beaucoup d’attention au Genevois. Si ce fut une scélératesse, elle fut excusable, et le comte l’avait bien méritée. Il devint âcre et querelleur, au point que lady Mowbray, qui vit Olivier très disposé à lui tenir tête, craignit une scène ridicule et fit entendre au jeune homme qu’il eût à se retirer. Olivier comprit fort bien, mais il affecta la gaucherie d’un campagnard, et parut ne se douter de rien jusqu’à ce que Métella lui eût dit tout bas : — Allez-vous-en, mon cher monsieur, je vous en prie.

Olivier feignit de la regarder avec surprise.

— Allez, ajouta-t-elle, profitant d’un moment où le comte allait prendre le chapeau d’Olivier pour le lui présenter ; vous m’obligerez, je vous reverrai…

— Madame, le comte s’apprête à me faire une impertinence ; il tient mon chapeau : je vais être obligé de le traiter de fat, que faut-il que je fasse ?

— Rien, allez-vous-en et revenez demain soir.

Olivier se leva : — Je vous demande pardon, monsieur le comte, dit-il, vous vous trompez, c’est mon chapeau que vous prenez pour le vôtre ; veuillez me le rendre, je vais avoir l’honneur de vous saluer.

Le comte, toujours prudent, non par absence de courage (il était brave), mais par habitude de circonspection et par crainte du ridicule, fut enchanté d’en être quitte ainsi. Il lui remit son cha-