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REVUE DES DEUX MONDES.

CURIUS.

Balanceras-tu encore entre le consul Antonius et moi ? tu le sais, je puis mettre toutes les richesses de Rome à tes pieds. La ville est à nous ; veux-tu les jardins de Crassus ? veux-tu la gerbe d’or de Cérès ? veux-tu le temple même de Junon ?

FULVIE.

J’aime mieux la maison de Lupa la comédienne.

CURIUS.

Tu n’as qu’à choisir.

FULVIE.

Tu ne me crois pas, je pense, de la famille des Bestia, et je ne m’enflammerai pas sur la foi de tes promesses.

CURIUS.

Tu pourras te convaincre de tes propres yeux.

FULVIE.

Dans tout ceci, je ne vois qu’une orgie, et je ne suis point venue par ambition, mais par curiosité.

CURIUS.

Sois ambitieuse, je t’en prie.

FULVIE.

On m’a dit qu’on voyait et qu’on entendait ici des choses extraordinaires, des choses qui font frémir la nature !…

CURIUS.

Laisse venir Catilina, tu n’as plus que le temps de désirer.

FULVIE.

Est-ce vrai tout ce qu’on raconte de vous ? On dit que ce n’est pas du vin que vous buvez ici !

CURIUS.

Du sang, peut-être !

FULVIE.

On dit qu’hier vous avez mangé un enfant !

CURIUS.

Nous en mangerons bien d’autres !

FULVIE.

Et que vous buvez dans des crânes d’hommes !

CURIUS.

La terreur écrit mal l’histoire. Tant mieux pour nous : grâce