Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 3.djvu/625

Cette page a été validée par deux contributeurs.
619
RÉVOLUTION DU MEXIQUE.

parmi ses ennemis des hommes qui firent son éloge funèbre, alors qu’il était dangereux de ne pas outrager sa mémoire.

Moctezuma quitta enfin Tampico, pour se rendre à San-Luis-Potosi, et sa marche eut lieu sans obstacle.

Le 23 mai, dans la séance de clôture du congrès général, Bustamente, annonçant officiellement la levée du siége de la Vera-Cruz par le général Calderon, exprimait encore l’intention de maintenir, à l’égard de Santa-Anna, l’attitude d’un juge sévère ; mais, en même temps, il déclarait qu’il avait jugé à propos d’accepter la démission des ministres ; et les chambres avaient accueilli favorablement cette mesure. On crut généralement que la retraite des ministres affaiblirait beaucoup le parti des révoltés ; car, dès ce moment, la question changeait de nature : leur général ne pouvait plus alléguer que c’était à des ministres responsables qu’il venait demander compte de leur administration ; désormais c’était contre le vice-président lui-même, contre le chef légalement reconnu de l’état, qu’il dirigeait ses attaques, et ses armes semblaient menacer les lois du pays. Sa levée de boucliers devait donc prendre un caractère odieux pour tous les hommes amis de l’ordre public. Afin de ne pas donner une couleur tranchée à la politique du gouvernement, Bustamente laissa vacantes les places des ministres, lesquelles furent réellement remplies par les premiers secrétaires ou par les chefs des administrations, sous l’impulsion directe du vice-président. Cette marche incertaine de l’autorité, ces lois au nom desquelles on combat et qu’en même temps on foule aux pieds, doivent présenter d’étranges anomalies pour les hommes élevés sous un gouvernement depuis long-temps reconnu et respecté ; mais le Mexique est encore plongé dans un chaos politique que le temps seul peut débrouiller.

Santa-Anna sentit le coup que portait à son parti la dissolution du cabinet, et pour se replacer sur le terrein de la légalité, il conçut l’idée de s’autoriser du nom de Pedraza : il lui expédia sur-le-champ à Philadelphie, où il vivait retiré, un officier de confiance, le colonel Castillo, pour lui offrir de le conduire en triomphe jusqu’à Mexico, s’il voulait consentir à reprendre le fauteuil. Les rôles se trouvaient ainsi subitement changés. Bustamente n’était plus qu’un usurpateur qui avait chassé l’élu du peuple, et qui,