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RÉVOLUTION DU MEXIQUE.

ignorance, soit qu’il connût l’incapacité de son ennemi, ne fit pas déblayer la plaine ; il se contenta de mettre des canons le long des remparts. Calderon plaça son camp derrière les dunes ; il fit élever à peu de distance du rivage un bastion armé de trois mortiers, et alors commença ce qu’on appela le siége. Le matin et le soir les assiégeans lançaient sur la ville quelques bombes, qui souvent éclataient à mi-distance, presque aucune n’arrivait jusque dans l’enceinte des murailles ; les assiégés, par courtoisie, leur rendaient le salut par le même nombre de bombes, dans la direction présumée des batteries ennemies, et avec aussi peu d’effet que les premières. Ce manége dura deux mois, sans que de part et d’autre on obtînt aucun avantage. Deux chaloupes canonnières sous les ordres du capitaine Cochrane, ayant pour second notre compatriote Reybaud, allèrent du côté d’Antigoa attaquer un petit fortin qu’avait construit Calderon. La canonnade fut vive ; Reybaud, audacieux comme un pirate, alla se placer aussi près que possible du feu de l’ennemi, mais il fut obligé de se retirer après avoir eu un bras emporté par un paquet de mitraille. Son courage et son sang-froid ne l’abandonnèrent pas un instant, et il supporta les suites de sa blessure avec une admirable résolution.

Pendant que le siége traînait ainsi en longueur, la garnison de Tampico, composée de deux mille hommes de troupes régulières, balançait encore incertaine ; un tailleur se mit dans la tête de la décider en faveur de Santa-Anna. Il réunit plusieurs soldats influens avec lesquels il se trouvait lié, les enflamma par un bon repas à la suite duquel il parcourut avec eux les rues de la ville, aux cris de viva Santa-Anna ! Un grand nombre de leurs camarades se rallièrent à eux, et l’entraînement devint général. Les officiers subalternes en favorisèrent le mouvement, ou n’osèrent s’y opposer, et la garnison entière se déclara pour Santa-Anna. Elle offrit au général Moctezuma de le mettre à la tête de l’insurrection, et celui-ci, par conviction peut-être, mais plus probablement par nécessité, accepta ce poste. Moctezuma avait été envoyé par le gouvernement pour prendre le commandement des troupes et aviser aux moyens de maintenir la tranquillité dans l’état de Tamaulipas ; il est peu naturel de supposer qu’il soit entré spontanément dans l’insurrection, mais les circonstances et son intérêt personnel le