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ALDO LE RIMEUR.
ALDO.

Je suis parfaitement heureux de faire votre connaissance ; vous passez pour un homme d’esprit.

TICKLE.

Je n’en manque pas, et vous pouvez déjà vous en apercevoir à ma conversation.

ALDO.

Comment donc ! j’en suis ébloui, stupéfait et renversé !

TICKLE.

Je vois que vous êtes un homme de goût pour un poète.

ALDO.

Et vous un homme hardi pour un nain.

TICKLE.

Monsieur, je me conduis comme un nain avec les rustres : ceux-là ne causent qu’avec les poings ; et moi, ce n’est pas ma profession. Je porte des manchettes de dentelle, c’est mon goût.

ALDO.

C’est un goût fort innocent.

TICKLE.

Et qui a le suffrage des dames, généralement. Avec les dames, monsieur, comme avec les gens d’esprit, j’ai six pieds de haut, parce que sur ce terrain-là on se bat à armes égales.

ALDO.

Et les armes sont courtoises. Vous pouvez compter, je ne dis pas sur mon esprit, mais sur ma courtoisie. Puis-je savoir ce qui me procure l’honneur de votre visite ?

TICKLE.

Me permettez-vous d’être assis ?

ALDO.

De tout mon cœur, si vous ne me demandez pas de siége, car cet escabeau est le seul que je possède, et mon habitude n’est pas d’écouter debout ce que l’on vient me prier d’entendre.

TICKLE.

Je resterai de grand cœur sur cette table ; il ne m’en faut pas davantage pour être absolument à votre hauteur.