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MÉLANGES.

lement à la corne en simulait un quatrième. Ce cheval, qui était très bon, servit à un des fils du colonel pendant toute la campagne de Vénézuéla. Je ne sais ce qu’il devint ensuite.

M. Geoffroy Saint-Hilaire a vu en France un cas analogue de monstruosité sur un fœtus de cheval conservé dans la collection de M. Bredin, directeur de l’école vétérinaire de Lyon. La division ne se montrait qu’aux pieds de devant, comme dans les trois exemples déjà cités. Le pied gauche avait trois doigts, celui de droite n’en avait que deux.

La proportion des mulets aux chevaux est beaucoup plus forte dans le nouveau continent que dans l’ancien, et même le nombre absolu des premiers dans les deux Amériques est de beaucoup plus considérable que dans tout le reste du monde ensemble. On pourrait donc s’attendre à y voir assez fréquemment des cas de mules fécondes. Ces cas cependant y sont fort rares, quoique certains auteurs aient avancé le contraire. Parmi le peu d’observations que j’ai pu recueillir à ce sujet, une seule me paraît digne d’être rappelée, parce qu’elle donne, sur le mulet parvenu à l’âge adulte, des renseignemens que je n’ai vus nulle part ailleurs. En 1812 dans la maison du doyen de la cathédrale de Puebla, une mule mit bas son petit qu’elle nourrit, qui vint à merveille, et n’aurait pu être distingué d’un vrai cheval ; il avait la queue aussi fournie de crins ; les oreilles, les sabots, tout était semblable : l’animal était noir, haut de près de cinq pieds (seis cuartas y media). Dans une réquisition de chevaux, il fut pris pour l’armée et servit au général Moran, alors commandant du régiment de dragons de Mexico. Cet officier le garda jusqu’en 1820. L’allure ordinaire de ce métis était ce qu’on appelle en Amérique le pas castillan, pas que prennent beaucoup de chevaux. Tous ces détails m’ont été donnés par M. Moran lui-même, et je suis aussi sûr de leur exactitude que si je les avais recueillis directement.

Les anciens ont parlé d’une race de mules fécondes que l’on trouvait à l’état sauvage en Cappadoce. Tout ce qu’ils ont dit à ce sujet paraît se rapporter au ziggetai, animal qui appartient au même genre que l’âne et le cheval, mais qui ne provient point du mélange des deux espèces.

Ces sortes de croisemens ne s’opèrent guère que sous l’influence de l’homme, et je ne sais si l’on en pourrait citer un exemple bien avéré chez les animaux qui n’ont jamais perdu leur indépendance, ou même chez ceux qui l’ont recouvrée. Ainsi dans les campos de Maldonado, où se trouvent à la fois des ânes et des chevaux sauvages, on n’a jamais vu naître de mulets ailleurs que dans les fermes.

Il s’en faut de beaucoup que l’on trouve en Amérique, à l’état d’indépendance, autant d’ânes que de chevaux. Les premiers n’existent que dans